La religion combattue dans l'oeuvre romanesque d'Emile Zola
KAEMPFER, J.
La religion est un thème qui traverse toute l’œuvre romanesque d’Émile zola. Les critiques, qui se sont penchés sur ce sujet, voient chez cet auteur soit un anticlérical (Pierre Ouvrard), soit un apôtre de la déchristianisation (Sophie Guermès). Le but de ce mémoire est de retravailler ce thème afin de montrer que l’œuvre zolienne ne s’inscrit pas dans un antichristianisme pur et dur.
Ce mémoire est divisé en quatre dominantes (la religion combattue par la nature, les rapports entre le clergé et le peuple, les rapports entre Rome et le catholicisme, la religion combattue par la raison). Pour chaque dominante, un ou plusieurs romans de l’auteur ont été sélectionnés.
Ce travail essaie de démontrer que l’œuvre zolienne ne vise pas à une déchristianisation du monde, mais qu’elle cherche plutôt à le « déromaniser ». Chez Zola, la religion catholique n’a rien à voir avec le christianisme des origines et le pape n’est que le successeur des empereurs romains. La religion catholique provient donc d’une tare héréditaire qui se transmet de génération en génération. Le rapprochement entre la famille peuplant les Rougon-Macquart, le Second Empire et le catholicisme s’impose de lui-même (les trois ont pour origine une tare héréditaire). L’oeuvre zolienne aboutit à l’éradication de ces trois atavismes : la chute du Second Empire (La Débâcle), la fin des rougon-Macquart (Le Docteur Pascal), l’abandon de la religion par l’abbé Pierre Froment (Les Trois Villes) et la construction d’une société, certes utopique, basée sur les préceptes du christianisme des origines (Les Quatre Evangiles).
Selon ce mémoire, l’œuvre zolienne ne cherche pas à saborder le christianisme, mais le catholicisme romain. Elle tend vers un retour aux préceptes du christianisme primitif, tel qu’il apparaît dans les Évangiles
Autour de quatre romans de Laurent Mauvignier : le déploiement d'une “écriture du subi”
KAEMPFER, J.
Lire Mauvignier, c’est accueillir une littérature singulière au pouvoir évocateur puissant, qui éveille la sensibilité du lecteur dès les premières lignes. Plus précisément, il émane univoquement de ses romans un sentiment particulier, celui d’une « écriture du subi ». L’objet de cette analyse est de vérifier la validité de cette désignation. À partir d’un corpus de quatre œuvres – Loin d’eux (1999), Apprendre à finir (2000), Ceux d’à côté (2002) et Seuls (2004), nous nous proposons ainsi d’examiner la configuration originale, complexe et plurielle que présente cette écriture, dans ses versants thématique, stylistique et narratologique, pour appréhender la question mentale et traduire des états particuliers de déréliction, renouvelant à ce titre le roman psychologique. Nous nous attacherons à montrer que cette matrice commune de l’« écriture du subi » se décline dans chaque texte de façon spécifique, ces variations fondant la richesse d’un espace littéraire constitué à la fois de repères et de découvertes. En pointant les états d’un réel rendu malade par l’incommunicabilité, nous verrons que Mauvignier ouvre des perspectives littéraires où se croisent les domaines de la psychologie et de la philosophie de la vie.
Une façon particulière et fantasque de voir et de
sentir ». Approche de la vision dans le Voyage en Orient
de Gérard de Nerval
Dominique Kunz Westerhoff
« Il est […] possible qu’on voyage sans regarder, ou bien qu’on regarde sans voir. » Ecrite en 1838, cette déclaration définit, en creux, un principe auquel Nerval tâche de se tenir dans la plupart de ses voyages : celui d’un détachement face aux conventions « touristiques » au profit d’une manière singulière de voir le monde. Au cœur du « siècle du voyage », Nerval a tôt fait de s’apercevoir qu’il n’est pas évident d’être surpris par ce que certaines contrées donnent à voir, tant ces contrées – en l’occurrence celles d’Europe et d’Orient – ont été parcourues et décrites par d’autres écrivains. Pour préserver (ou ranimer) son enthousiasme devant des horizons bien connus de ses contemporains, le voyageur doit s’armer d’une vision particulière. Dans le Voyage en Orient (1851), la recherche de cette vision particulière constitue un des enjeux fondamentaux de l’expérience du narrateur. Comment voir pour nourrir l’imagination ? Quels sont les lieux qui peuvent encore enchanter l’œil du voyageur ? Telles sont les questions contre lesquelles Nerval bute sans relâche au long de son récit. En s’adonnant à ce qu’il appelle « une façon particulière et fantasque de voir et de sentir », il cherche ainsi à assurer l’originalité de son parcours et, par là, à s’affranchir de certains codes visuels et esthétiques du voyage. À la croisée des paysages romantiques, de la fiction archéologique et du récit de promenade, le Voyage en Orient établit plusieurs variations autour de la vision. Ce travail propose, à partir des divers espaces traversés au cours du récit, une réflexion sur les implications littéraires de ce thème. Au fil d’analyses centrées sur le cheminement à la fois géographique et textuel de Nerval, se fait jour un point de vue original et critique sur l’activité perceptive en voyage, où les manières d’appréhender le monde se muent en une écriture « fantasque ».
Le traitement de la mémoire au sein de l’univers post-exotique : L’exemple de Dondog et de Lisbonne dernière marge d’Antoine Volodine
Kaempfer, Jean
Antoine Volodine s’inscrit dans une réflexion majeure de notre époque contemporaine en construisant un univers littéraire – le post-exotisme – qui constitue une expérimentation de la matière mémorielle. Ce présent travail propose d’envisager deux textes emblématiques du traitement volodinien de la mémoire : Lisbonne dernière marge et Dondog1 afin de saisir la nature profondément problématique de la matière mémorielle présente au sein de ces romans. Ce mémoire a donc pour ambition de comprendre la manière dont Volodine travaille le paradoxe de la mémoire et de mettre à jour les différents effets d’une telle position dans l’horizon littéraire contemporain.
"Guerre et Peur : Vision de la première guerre mondiale selon Gabriel Chevallier"
Kaempfer, Jean
La Peur de Gabriel Chevallier se veut un véritable réquisitoire contre la guerre. L’immersion au cœur du premier conflit mondial que l’auteur propose permet non seulement d’appréhender le quotidien des soldats, mais également de comprendre la place prépondérante qu’occupe le sentiment de peur au front. Aussi avons-nous axé la première partie de cette étude sur la description des principaux thèmes développés par Chevallier, à savoir l’horreur de la guerre, le rapport entre soldats et officiers, la distinction entre l’arrière et le front et, bien sûr, la peur. L’analyse de ces concepts nous a ensuite conduit à rapprocher La Peur d’autres grands romans de guerre. Nous avons ainsi pu constater nombre de similitudes entre le texte de Chevallier et ceux de Barbusse ou de Céline. Enfin, après avoir replacé La Peur dans la tradition littéraire qui l’a vu naître, il semblait important de se questionner sur le rôle que cette œuvre et les romans de guerre en général sont susceptibles de jouer dans la construction historique contemporaine. Un tel cheminement fait apparaître le positionnement de Chevallier, qui, à travers son personnage, critique une guerre qu’il espère ne plus jamais voir se reproduire.
Gandalf Avatar de Merlin : les influences médiévales qui ont amené à façonner le magicien du Seigneur des Anneaux.
Corbellari, Alain
Ce travail a pour objectif de démontrer qu'il existe un lien étroit entre Merlin et Gandalf. Parfaitement renseigné à propos des sources du Moyen Age, et en particulier de la littérature arthurienne, J. R. R. Tolkien s'est inspiré de certaines caractéristiques du personnage médiéval pour façonner le Cavalier Blanc du Seigneur des Anneaux.
Origines floues, ressemblances physiques flagrantes, passion pour la pérégrination, la nature et le milieu forestier, similitudes au niveau des pouvoirs et des statuts seront notamment mis en parallèle afin d'illustrer le propos. Le résultat aboutira à la question suivante: Gandalf est-il une réincarnation moderne de Merlin, ou le personnage médiéval doit-il être considéré comme un point de départ de l'Istari de Tolkien?
A travers cette étude entre les sources médiévales et l'oeuvre contemporaine de l'auteur britannique, il s'agira également d'illustrer le pouvoir de la réécriture, et de justifier l'idée que celle-ci permet de considérer la source - en l'occurrence Merlin dans le cadre de ce travail - avec un regard critique, voire parfois même accusateur.
Une façon particulière et fantasque de voir et de sentir ». Approche de la vision dans le Voyage en Orient de Gérard de Nerval
Kunz Westerhoff, Dominique
« Il est […] possible qu’on voyage sans regarder, ou bien qu’on regarde sans voir. » Ecrite en 1838, cette déclaration définit, en creux, un principe auquel Nerval tâche de se tenir dans la plupart de ses voyages : celui d’un détachement face aux conventions « touristiques » au profit d’une manière singulière de voir le monde. Au cœur du « siècle du voyage », Nerval a tôt fait de s’apercevoir qu’il n’est pas évident d’être surpris par ce que certaines contrées donnent à voir, tant ces contrées – en l’occurrence celles d’Europe et d’Orient – ont été parcourues et décrites par d’autres écrivains. Pour préserver (ou ranimer) son enthousiasme devant des horizons bien connus de ses contemporains, le voyageur doit s’armer d’une vision particulière. Dans le Voyage en Orient (1851), la recherche de cette vision particulière constitue un des enjeux fondamentaux de l’expérience du narrateur. Comment voir pour nourrir l’imagination ? Quels sont les lieux qui peuvent encore enchanter l’œil du voyageur ? Telles sont les questions contre lesquelles Nerval bute sans relâche au long de son récit. En s’adonnant à ce qu’il appelle « une façon particulière et fantasque de voir et de sentir », il cherche ainsi à assurer l’originalité de son parcours et, par là, à s’affranchir de certains codes visuels et esthétiques du voyage. À la croisée des paysages romantiques, de la fiction archéologique et du récit de promenade, le Voyage en Orient établit plusieurs variations autour de la vision. Ce travail propose, à partir des divers espaces traversés au cours du récit, une réflexion sur les implications littéraires de ce thème. Au fil d’analyses centrées sur le cheminement à la fois géographique et textuel de Nerval, se fait jour un point de vue original et critique sur l’activité perceptive en voyage, où les manières d’appréhender le monde se muent en une écriture « fantasque ».
De l’aphonie à l’euphonie par le nettoyage : Le Savon, de Francis Ponge, ou la parole en quête d’euphorie
Noël Cordonier
L’œuvre de Francis Ponge, dans sa globalité, présente un aspect protéiforme donnant l’impression d’une mosaïque textuelle foisonnante. Le Savon, par son dispositif textuel, par ses stratégies discursives, par la mise en fonctionnement du concept d’objeu et l’introduction de celui d’objoie, cristallise en un même texte les caractéristiques de la mosaïque sous forme d’un condensé virtuose et jouissif de la poétique pongienne.
Nous avons tenté d’analyser Le Savon par le brouillage énonciatif et discursif qui le parcourt de part en part ; nous avons réalisé une étude (micro)textuelle de la structuration des blancs et des signes typographiques de l’œuvre qui nous ont amené aux questionnements suivants : d’abord, dans quelle mesure les marques textuelles et le dispositif graphique participent-ils d’un brouillage ouvrant sur le latent ? Puis nous nous sommes questionnés sur le fonctionnement de ce flou : en quoi éclaire-t-il autrement ce qui relève du manifeste ? L’étude approfondie de la parole pongienne, dans Le Savon, nous a permis d’effectuer une tentative d’explicitation, relativement à ce qu’elle dissimule sans toutefois complètement l’effacer. Nous avons voulu montrer par quelle sorte de brouillage Le Savon passe de l’aphonie à l’euphonie, à savoir du silence à une parole cherchant l’agrément phonique, et dans quelle mesure ce mouvement, qui mène au nettoyage, est significatif de l’œuvre pongien. Enfin, nous avons tenté de répondre à l’interrogation suivante : comment la parole, à travers les voix qui se manifestent dans le texte selon différents modes, peut-elle être en quête d’un mouvement – celui, mécanique, de deux pièces qui ont assez de « jeu » pour être mobiles mais pas suffisamment pour gripper ou grincer – dont la finalité serait la recherche d’une autonomie euphorique ?
La solidarité et la solitude dans La Peste, L’hôte et Jonas ou l’artiste au travail d’Albert Camus
Barilier, Etienne
La solidarité et la solitude sont des thèmes récurrents chez Albert Camus. Sa vie et son œuvre en sont empreints. Dans ce travail, nous verrons comment ces notions sont traitées dans trois œuvres de l’auteur : La Peste, L’hôte et Jonas ou l’artiste au travail. Tous les protagonistes ressentent à un moment ou un autre des sentiments de solidarité et de solitude. Certains arrivent à maintenir un équilibre entre les deux ; d’autres privilégient l’un plus que l’autre, avec toutes les conséquences que cela entraîne. Nous verrons que l’exil physique et psychologique des protagonistes peut être atténué par la solidarité humaine. Cependant, cette dernière peut également entrer en conflit avec la volonté de solitude et, ainsi, l’exacerber.
Par l’étude de ces trois œuvres, nous verrons donc que la solidarité et la solitude sont en réalité complémentaires. Le titre même du recueil L’exil et le royaume en témoigne. Leurs relations sont également ambiguës, au point que la fin des nouvelles reste en suspens.
L’Europe avant tout ! Évolution de la pensée européenne de Pierre Drieu la Rochelle
Barilier, Etienne
Lorsqu’il est commenté, le parcours politique de Pierre Drieu la Rochelle est pratiquement toujours évoqué en fonction de son épilogue. Au fil du temps, Drieu a ainsi été résumé à ses prises de positions fascistes et à son collaborationnisme. Mais, comme l’a très bien formulé Jean-Louis Saint-Ygnan, « dire que Drieu est un écrivain fasciste ne signifie presque rien ; l’important est de chercher pourquoi il l’a été et de montrer les formes que cette tentation a prises. » Ainsi, au-delà du jugement et des définitions figées, le but de ce travail est de rendre compte de ce « pourquoi ». Dès lors, il s’agira pour nous de remonter aux premières réflexions politiques de Drieu et de couvrir l’ensemble de son parcours. En suivant l’évolution de cet homme, nous nous rendrons vite compte de la véritable nature de son engagement politique. Nous verrons que, hanté par la crise de la civilisation occidentale, Drieu a rapidement fait de l’Europe sa priorité. À la lumière de son européisme, le parcours tragique de ce « Français d’Europe » s’avèrera éminemment plus complexe et enrichissant que l’étiquette d’« écrivain collabo » ne le laisse entendre. En véritable sismographe des passions qui ont déchiré la première moitié du XXe siècle, Drieu s’imposera, au terme de ce travail, comme un témoin, une figure essentielle à la compréhension de son époque et un Européen avant tout.
Le rapport au spectateur dans le théâtre contemporain : vers une implication inédite ? Une étude à l’épreuve de trois spectacles.
Chaperon, Danielle
« Le théâtre est un rapport, et non un produit. » À l’heure où le théâtre se trouve placé dans une position marginale face au marché médiatique, et où la théorie comme la pratique paraissent se focaliser moins sur le contenu des spectacles que sur leur façon de faire sensation, il semble intéressant de prendre aujourd’hui ce basique constat au sérieux.
De quelle manière le spectateur se voit-il impliqué dans la relation théâtrale contemporaine ? Celle-ci exige-t-elle de lui, comme l’avance Hans-Thies Lehmann, « un état d’esprit entièrement repensé » ? Pour explorer le rapport au spectateur que cherche à instaurer le théâtre expérimental actuel – et par extension, les fonctions qu’il se donne –, cette étude propose quatre grands chapitres. Ceux-ci abordent, respectivement, la manière dont le théâtre contemporain semble se détacher du projet de fournir au spectateur un message ou une dimension référentielle pour privilégier au « sens » des dispositifs sensibles ; la mise en cause de la notion de « public » et l’autonomisation manifeste du spectateur de ce théâtre ; l’inconfort qu’il peut vouloir produire ; et l’apparente revalorisation de l’activité propre au spectateur, après les nombreux procès de « passivité » qui ont pu lui être faits. Ces quatre points sont traités à la lumière des réflexions de divers théoriciens, et d’un corpus de trois spectacles, issus du théâtre de l’Arsenic, qui témoignent de l’élaboration de la position spectatrice de Rodrigo García, d’Oskar Gómez Mata et du duo composé par Nicole Borgeat et Yan Duyvendak. Bien que très restreint, ce corpus permet d’observer un théâtre contemporain qui, de manière stimulante, paraît prendre le parti de responsabiliser son spectateur.
Le Chevalier Silence. Une aventure des Temps Aventureux de Jacques Roubaud : entre réécriture médiévale et réactivation ludique.
Wahlen, Barbara
Ce mémoire propose d’analyser Le Chevalier Silence. Une aventure des Temps Aventureux de Jacques Roubaud, auteur oulipien né en 1932, sous l’angle du régime ludique. Par cette étude, il s’agit de repérer et de déchiffrer les données ludiques dissimulées dans le texte - derrière les allusions et différents hypotextes - afin de saisir l’ampleur que prend le jeu dans l’écriture de Roubaud. Précisément, allier l’écriture savante et ludique à la littérature médiévale, tel est le résultat étonnant que donne à lire cette réécriture moderne qui se trouve au croisement de la tradition et du renouveau, de la littérature médiévale et moderne, d’une littérature arthurienne et une poétique oulipienne. L’œuvre étant constituée d’une intertextualité foisonnante, ce travail ne prétend pas en faire l’inventaire complet. Il vise plutôt à détecter certaines techniques appliquées par l’auteur pour installer son œuvre dans un rapport de lecture amusant.
Composé en trois parties, ce travail s’attarde tout d’abord sur Jacques Roubaud et sur sa conception de l’écriture, de la réécriture et du rôle de l’auteur. La réécriture se voit être le procédé idéal pour transmettre la matière médiévale tout en la renouvelant. Aussi, les motivations de l’auteur en tant que poète oulipien révèlent la volonté de créer de nouvelles formes d’écriture, en usant du jeu avec les mots et de l’humour. L’étude se poursuit en entrant au cœur du texte et en analysant certains motifs, certaines formes, certains topoï et personnages, tant animaliers qu’humains, ainsi qu’à l’onomastique : autant d’éléments réélaborés qui caractérisent le régime ludique de l’œuvre. Aussi, ces données réinvesties mettent en place un jeu de reconnaissance auquel le lecteur doit se prêter en mettant sa mémoire en marche. En sortant ensuite du texte pour s’intéresser au péritexte, on obtient un éclairage supplémentaire : l’auteur-narrateur-éditeur prend la parole dans les divers supports comme le prologue, la note de l’éditeur, la quatrième de couverture, et joue avec les références. Le lecteur doit à nouveau démêler le vrai du faux dans ce qui lui est exposé, constituant un jeu sur la reconnaissance. Au terme de l’analyse, il s’avère que la dimension ludique du Chevalier Silence semble traverser l’œuvre de part en part et se constitue dans un rapport d’auteur à lecteur tant dans le texte que dans son enveloppe.
Résurgences de la guivre et de Mélusine dans les légendes valaisannes. Quand les serpentes hantent le Vieux Pays...
Wahlen, Barbara
Constatant la présence de fées mélusiniennes, de vouivres et de fiers baisers dans les légendes valaisannes, ce mémoire se propose d'analyser les réutilisations de ces personnages de Renaud de Beaujeu, de Jean d'Arras et de Coudrette dans des récits populaires rédigés à la fin du XIXe, début du XXe siècle. Sans être des réécritures exactes, les légendes s'approprient les mythes médiévaux, en restant fidèles à leur « noyau dur », tout en les adaptant au contexte géographique, religieux et social du Valais romand. Ce travail s'attache ainsi à démontrer ces filiations littéraires et leurs transformations, basé sur un corpus de huitante-trois légendes et trois romans médiévaux essentiellement, par le biais de comparaisons principalement thématiques.
Entre sicence-fiction et monde empirique : une lecture réflexive.
Atallah, Marc
Guidé par la perspective d’une lecture réflexive des romans post- apocalyptiques de René Barjavel, le présent travail s’articule en deux parties. Dans un premier volet théorique, conçu avec la volonté de mettre à jour la mécanique des récits science-fictionnels et d’inscrire la démarche au sein d’une réflexion sur les interactions de celle-ci avec la réalité empirique, nous convenons d’un potentiel interrogatoire des récits de la science-fiction dite critique. Dans un second volet, nous envisageons la prise en charge subjective et critique de l’activité de lecture par l’analyse de la configuration narrative de nos romans (Ravage, Le Diable l’emporte, La Nuit des temps et Une rose au paradis). Pour ce faire, nous relevons la mise en scène d’univers aliénants et crédibles, de personnages assujettis au progrès et faisant l’expérience de la situation- limite d’une fin du monde ainsi que l’exposition des conséquences socio- anthropologiques du cataclysme. Susceptible d’éprouver le drame qui se joue au sein de la fiction, le lecteur apparaît comme pouvant se demander ce qu’il aurait fait à la place des héros avant de réfléchir à son propre rapport à la technoscience et, plus généralement, à ce qui constitue son quotidien. Le mode d’interaction à la sphère pratique, par des mondes science-fictionnels futurs et conjecturés, nous mène ainsi à l’établissement d’une dimension réflexive des textes du corpus.
Du poème au recueil : Textualité et transtextualité des Petits Poèmes en prose de Baudelaire
Adam, Jean-Michel
Ce travail aborde différents aspects de la textualité et de la transtextualité des Petits Poëmes en prose de Baudelaire, par l’analyse détaillée de trois poèmes de ce recueil : « Le Crépuscule du soir », « Les Dons des Fées » et « Enivrez-vous », et par une étude logométrique de son système énonciatif.
L’analyse comparative des « Crépuscule[s] du soir » en prose et en vers donne lieu à une réflexion sur l’intratextualité et la cotextualité, puisque ces deux poèmes ont paru en miroir dans l’ouvrage collectif Fontainebleau, et montre comment une même origine idéelle se manifester au travers de deux régimes de poéticité différents. L’analyse génétique du « Crépuscule du soir » en prose met en lumière les procédés transformationnels utilisés par Baudelaire lors de la réécriture de ses textes.
L’analyse des « Dons des Fées » se concentre essentiellement sur le dialogue intertextuel que ce poème entretient avec l’œuvre de Perrault et qui se manifeste notamment par l’emploi de nombreuses majuscules à l’initiale de lexèmes particuliers. La « reconfiguration générique » opérée par Baudelaire va dans le sens de l’ironie et fait de ce poème une parodie du conte de fée.
L’analyse du poème « Enivrez-vous » met prioritairement l’accent sur les procédés rhétoriques (répétitions diverses, encadrements) et sur les rythmes (surtout binaires et ternaires) utilisés par Baudelaire lors de l’écriture de ses poèmes en prose et qui font partie intégrante de leur poéticité. L’examen des relations intratextuelles (principalement autour de la thématique de l’ivresse, très prégnante chez cet auteur), met en évidence la grande cohérence qui règne dans son œuvre.
Enfin, l’analyse logométrique montre, par l’examen des formes verbo-temporelles, le haut degré de narrativisation qui caractérise les poèmes du Spleen de Paris et permet ainsi de distinguer ce recueil de celui des Fleurs du mal, bien que tous deux se rejoignent par une dominance globale du système (inter)locutif.
« Blanc comme la neige noire des cauchemars », Merlin, don du ciel et excroissance de l'enfer ?
Le bien et le mal dans un corpus médiéval et un texte de Catherine Dufour
Wahlen, Barbara
Le travail se propose de comparer le personnage de Merlin dans un corpus médiéval (Geoffroy de Monmouth, Wace, Robert de Boron, La Suite du Roman de Merlin) et un texte moderne (Blanche-Neige contre Merlin l'enchanteur de Catherine Dufour) à travers la problématique du bien et du mal. Savoir où se situe Merlin, entre Dieu et le diable, est essentiel dans les textes du Moyen Age. Alors que cette préoccupation est dépassée dans un texte, à priori, iconoclaste tel que celui de Dufour, il est possible de l'observer à de nombreuses reprises, notamment en ce qui concerne l'origine de l'enchanteur, ses pouvoirs, ses éclats de rire et le rôle qu'il joue dans la conception d'Arthur. En annexe, un entretien avec Catherine Dufour.
Merlin, « lieu vivant de tous les contraires » :
évolution et variations du thème de la dualité chez Michel Rio
Wahlen, Barbara
Ce travail se propose d'étudier le cycle romanesque arthurien de Michel Rio, auteur contemporain français, en le comparant et en le contrastant avec les principaux textes médiévaux impliquant la figure de Merlin. C'est en effet sur l'ambivalence de ce personnage, central chez Rio, que porte notre réflexion. Elle s'organise autour de quatre axes principaux : les origines du protagoniste, primordiales dans cette trilogie arthurienne, la suppression par l'écrivain des pouvoirs surnaturels habituellement attribués à l'« enchanteur », qui perd ici sa dénomination première, l'opposition que le romancier établit entre nature et culture au sein des quatre textes qui font l'objet de notre analyse et finalement le statut de double de l'auteur que Merlin endosse dans ces mêmes ouvrages. C'est à travers l'étude de la dualité de la nature de ce personnage que pourra être explicitée la conception que Michel Rio se fait de la littérature et de l'histoire du royaume de Logres, de sa naissance à son effondrement.
La collection « naïve sessions » réunit neuf textes d’auteurs francophones, imprégnés du monde du rock et de la culture pop. Lancée en 2005 par la maison de disques et de littérature naïve, cette collection propose des textes de fiction s’emparant de figures mythiques du rock ou développant des narrations sur la base de la musique d’un artiste, d’un groupe. Ce travail a pour but d’analyser ce projet de collection en trois temps, sous trois approches différentes :
La première partie présente les conditions d’émergence de la collection dans le champ littéraire français au début du XXIe siècle, en considérant les différents paramètres d’un tel projet éditorial : choix des auteurs, « contrat » de commande, aspects financiers. Comme les auteurs rassemblés pour la collection collaborent à divers autres projets, notamment la revue Inculte, il est également question d’un possible « milieu littéraire ».
La seconde partie est consacrée aux questions formelles engagées par les « naïve sessions ». Il y est question des différentes orientations génériques choisies par les auteurs de la collection – biofictions, fictions à thématiques musicales... L’étude du procédé biofictionnel interroge également la notion de biographie et son rapport à la fiction. Cette partie est au surplus le lieu d’une analyse stylistique des neuf ouvrages, centrée sur la notion de rythme, ainsi que sur l’usage de la citation, procédé propre au traitement littéraire d’un sujet musical.
Comme les livres de la collection s’emparent de figures souvent considérées comme mythiques, telles que Mick Jagger ou Kurt Cobain, la troisième partie est axée sur cette question du « mythe du rock », et permet d’une part de clarifier la notion, et d’autre part d’examiner par quels moyens les auteurs des naïve sessions font foisonner, ou au contraire diminuer l’aura mythique des icônes du rock.
Variation autour des destins de femmes dans « Une si longue Lettre, (Mariama Bâ) »
Le Quellec Cottier, Christine
Depuis trois décennies, la littérature africaine fictionnelle dévoile de nombreux talents féminins. Les récits que ces romancières d’Afrique noire publient sont déroutants, troublants, tant ils excellent en vraisemblance. En cela, ils posent la question du rapport qui unit la fiction à la réalité. Bakhtine et Schaeffer conçoivent ce lien non pas comme une dichotomie – comme l’entend l’opinion publique – mais comme le résultat d’une duplication, dans le sens où la fiction constituerait une émanation de la réalité. Mariama Bâ, Ntyugwetondo Angèle Rawiri et Salla Dieng sont trois écrivaines africaines qui exploitent l’art de produire de la fiction à des époques différentes. Cet essai met en lumière comment chacune d’entre elle procède pour hisser le réalisme de leur roman à son paroxysme. Comment peut-on appréhender à partir d’Une si longue Lettre, de G’amèrakano au carrefour et de La dernière Lettre les présupposés de Bakhtine et de Schaeffer ? Placée dans un contexte où la plume se profile comme une arme redoutable, la question du rapport entre la réalité et la fiction en induit une seconde propre à l’engagement de ces femmes écrivaines : comment la fiction permet-elle de dénoncer, voire de remettre en question les destins que la société assigne aux Africaines ? Quels sont les processus fictionnels pour rendre à ces figures féminines – trop longtemps idéalisées et rendues statiques par les premiers écrivains africains issus de la Négritude – leur profondeur, pour les animer et les faire évoluer ? Notre raisonnement se situe entre le réel et le fictionnel, entre la création et la réception, entre le contenu et la forme.
Albert Camus : "Caligula", analyse génétique de deux états d'un texte théâtral.
Adam, Jean-Michel
Ce travail de Mémoire propose d’analyser deux états de la pièce de théâtre Caligula d’Albert Camus. Comme beaucoup d’œuvres littéraires et théâtrales, cette pièce a connu nombre d’évolutions, des premiers plans et brouillons aux premiers jets, jusqu’au bon à tirer et à une première édition, elle-même suivie d’ajustements et de variations dans les éditions suivantes. Nous avons choisi d’entreprendre cette analyse sur deux états qui relèvent de l’anomalie génétique : nous avons en effet pour le cas de Caligula une première version définitive et dactylographiée en 1941, envoyée à différents éditeurs en même temps que les deux autres œuvres du « cycle de l’Absurde » que sont L’Etranger et Le Mythe de Sisyphe, version définitive qui sera pourtant retravaillée par Camus et qui ne sera éditée qu’en 1944, en deuxième partie du Malentendu. Alors donc qu’elle semblait terminée et que paraissent en 1942 le roman et l’essai sur l’Absurde, la pièce de théâtre est profondément remaniée.
En prenant comme cadre théorique la critique génétique et la génétique textuelle, qui s’intéressent toutes deux au devenir d’une œuvre dans le temps, avant (pour la critique génétique) et après (pour la génétique textuelle) sa publication, nous nous sommes intéressés aux variations observables entre 1941 et 1944 en terme d’ajouts, de suppressions, de remplacements ou de déplacements, quatre processus qui nous ont permis de mettre en évidence les changements opérés par Camus. Il en est ressorti plusieurs constantes que l’on peut catégoriser en quatre domaines. Premièrement, Camus a cherché à améliorer la dimension théâtrale et son aspect dramatique en simplifiant des didascalies trop nombreuses et littéraires ; ensuite, il a tenu compte – de façon consciente ou non – du contexte historique de la Seconde Guerre Mondiale en faisant évoluer le personnage principal de l’empereur désespéré en un tyran ; les différentes critiques des premiers lecteurs l’ont convaincu de gommer les traces d’un romantisme et d’une sensibilité qui les dérangeaient ; enfin, en bon philosophe, il a évidemment fait suivre au sens de la pièce l’évolution de sa propre pensée qui effectue un tournant majeur au début des années 40, passant de l’Absurde à la Révolte comme base de réflexion fondamentale.