Le langage des jeunes en Suisse romande : étude sociolinguistique menée dans un foyer d’accueil à Lausanne.
Durrer, Sylvie
À ce jour, le phénomène de la langue des jeunes fait l’objet de diverses études en Europe. Le présent travail se propose d’analyser de manière empirique les conversations d’adolescents recueillies au sein d’une institution sociale à Lausanne, afin de comprendre le langage des jeunes en Suisse romande dans une perspective à la fois synchronique et diachronique. D’après un corpus établi par observation directe, puis enregistrements et transcriptions de conversations, une analyse des données linguistiques sur le plan phonologique, morphosyntaxique et lexical pourra être menée. Les traits saillants observés par l’analyse du corpus seront alors étudiés de manière comparative et parallèle non seulement au langage populaire (en tant que vernaculaire pratiqué par la même classe socio-générationnelle) décrit rigoureusement par Françoise Gadet, mais aussi parallèlement aux diverses études consacrées au phénomène de la langue des jeunes, observé dans les cités en France par nombre de chercheurs en linguistique et en sociologie ou encore par les médias. Cette étude permettra alors de situer le langage des jeunes en Suisse romande sur le plan linguistique, en tant que variation et indice de changement, et sur le plan sociologique en tant que marqueur identitaire. Enfin, une réflexion sera proposée afin de saisir comment la dimension linguistique s’articule à la dimension psychosociale de la construction de l’identité chez l’adolescent.
Quand l’agneau se couche aux côtés du tigre. Etude comparative de La Belle et la Bête de Jeanne Marie Leprince de Beaumont et de The Courtship of Mr Lyon et The Tiger's Bride d'Angela Carter.
Heidmann, Ute
L’objet de ce mémoire est l’étude comparative du conte de « La Belle et la Bête » de Jeanne Marie Leprince de Beaumont (1756) et des deux réécritures qu’en propose Angela Carter dans « The Courtship of Mr Lyon » et « The Tiger’s Bride » (1979). La méthode comparative et la mise à égalité des deux textes permettent de mettre en lumière les visées esthétiques et idéologiques des auteurs de ce corpus. Le mémoire examine tout particulièrement la façon dont les trois textes explorent les rapports de force entre la Belle et la Bête. Les auteurs se servent de l’histoire du fiancé animal pour tenir un discours critique sur les normes culturelles, sociales, politiques et économiques qui mettent en place une représentation dichotomique des rapports entre hommes et femmes et entre humains et animaux. Dans leurs représentations de ces rapports, Mme de Beaumont et Angela Carter démontrent que contrairement aux apparences, l’agneau et le tigre ne sont pas toujours ce que l’on croit.
L’homme et la Terre. Etude comparative du mythe de Deucalion et Pyrrha dans les Métamorphoses d’Ovide et dans Die letzte Welt de Christoph Ransmayr (Die letzte Welt, chapitre 7.
Heidmann, Ute
Ce mémoire propose une comparaison de l’histoire de Deucalion et Pyrrha telle qu’elle apparaît dans les Métamorphoses d’Ovide et dans Die letzte Welt, récriture contemporaine de l’épopée romaine par l’auteur autrichien Christoph Ransmayr.Prenant comme axe de comparaison les rapports que l’homme entretient avec la terre, cette étude tente de dégager le fonctionnement du livre 1 des Métamorphoses dont les successives anthropogenèses permettent de comprendre étiologiquement le statut de l’être humain. À la bienveillance de la Terre-mère ovidienne à l’égard de ses enfants peu reconnaissants répond dans le roman « écologiste » une revanche de la nature : lasse d’être surexploitée, la terre du dernier monde inflige à l’humanité, inéluctablement décadente, une punition suprême, l’accablant avec acharnement sans la laisser mourir.
L’œuvre dramatique de Jean-Antoine du Cerceau. Le théâtre comme outil au service de l’éducation et d’une sociabilité dans les collèges jésuites au XVIIIe siècle.
Chaperon, Danielle
Ce mémoire met en lumière l'importance de l'art dramatique dans les collèges tenus par les jésuites au XVIIIe siècle. Plusieurs fois par année, les élèves de ces établissements scolaires offraient à un large public (parents, élèves, personnalités du lieu) des ballets et des pièces de théâtre écrites par les professeurs, en latin ou en français. Nous nous sommes concentrés sur l'oeuvre du jésuite Jean-Antoine du Cerceau (1670-1730), très apprécié de ses contemporains pour ses comédies morales. Notre recherche aboutit à la conclusion que la représentation des pièces de du Cerceau avait deux fonctions majeures. Premièrement, ces spectacles permettaient aux adultes de se retrouver autour de valeurs morales et idéologiques communes, telles que la stabilité sociale et les vertus chrétiennes. Deuxièmement, les pièces de du Cerceau prolongent les enseignements de la classe et du sermon. Elles contribuent ainsi à moraliser les élèves et à raffermir la ferveur des parents.
La relation entre le texte et la musique chez les trouvères. L’exemple de Thibaut de Champagne.
Corbellari, Alain
Lorsque l’on aborde le répertoire de la poésie lyrique médiévale, il est très surprenant de constater que les poésies sont présentées sans leur contexte musical. C’est un peu comme si on étudiait un film sans sa bande sonore. Le but de ce travail est de proposer une vue globale des poésies lyriques de Thibaut de Champagne afin de pouvoir les étudier dans leur intégralité, c’est à dire en tenant compte du rapport existant entre le texte et sa musique. Un retour sur les études des philologues et des musicologues du XXe siècle permet de comprendre les raisons qui ont poussé les critiques à s’abstenir d’intégrer la musique aux textes. Mais, en tenant compte des nouvelles études menées sur les pratique instrumentales médiévales, il est désormais possible d’aborder les textes et leurs mélodies dans leur application pratique, notament en tenant compte de la technique d’archet dans l’accentuation rythmique du texte. Dans cette optique pragmatique, les œuvres de Thibaut de Champagne sont particulièrement intéressantes, puisqu’il est avéré par les textes de ses contemporains que d’une part, il jouait lui-même de la vièle et que, d’autre part, la vièle était utilisée pour accompagner les poésies courtoises.
Corinna Bille - Emerentia 1713 - Chemins de création.
Jakubec, Doris
Emerentia 1713 raconte le destin d’Emerentia, petite fille de sept ans. A la mort de sa mère, Emerentia a développé des comportements étranges : elle refuse d’aller à l’église, de prier, de dire son catéchisme. Elle a associé les rites religieux à la mort. Sa famille la confie à un prêtre réputé pour sa sévérité, ils espèrent que son traitement la guérira. Isolée dans une cure sombre, entourée d’adultes qui la considèrent comme une sorcière, Emerentia cherche le réconfort dans la nature. Enfermée, humiliée, martyrisée, Emerentia ne pourra pas longtemps poursuivre sa lutte. Ce travail se propose d’analyser Emerentia 1713 sous différents aspects. Le plus important est celui de la critique génétique : j’ai analysé trois versions manuscrites des deux premiers chapitres, en recherchant leurs différences. J’ai essayé de découvrir de quelle manière le texte de Corinna Bille s’est mis en place, quels ont été ses choix. Puis j’ai comparé Emerentia 1713 au texte qui l’a inspiré, "La petite Mérette" de Gottfried Keller, ce qui m’a permis de mettre en évidence les particularités du texte de Corinna Bille. Enfin j’ai cherché les liens existant entre Emerentia 1713 et Virginia, qui ont été publiées ensemble dans le recueil Deux passions, ce qui m’a permis de mieux comprendre l’univers de Corinna Bille.
A la première lecture des romans de Semprún, tout lecteur est frappé par la récurrence des recours à d'autres langues – en général l'espagnol et l'allemand – dans le texte français. Si ces recours se justifient souvent par un certain souci du réalisme, ce dernier ne suffit toutefois pas à expliquer toutes les occurrences de mots étrangers. La répétition de ce phénomène et par ailleurs la maîtrise que Semprún a de la langue française laissent supposer que ce n'est nullement par incompétence linguistique que ses narrateurs changent ainsi de langue. En réalité, l'alternance entre deux ou plusieurs langues fait partie de ces phénomènes linguistiques que les spécialistes regroupent sous le terme générique de «marques transcodiques». Ces dernières, indissociables du «parler bilingue», renvoient à la compétence plurilingue du locuteur qui les utilise. Or, les études du bilinguisme ont pu démontrer que la présence de marques transcodiques chez un bilingue, et tout particulièrement de l'alternance de codes, répondait à des règles précises et remplissait diverses fonctions interactionnelles. La présence de ces marques transcodiques dans l'œuvre de Semprún ainsi que le rôle narratif et stylistique qu'ils y jouent suggèrent qu'il y aurait un usage littéraire de ces marques, probablement comparable à l'usage que les locuteurs bilingues en font dans l'expression orale spontanée. En changeant spontanément de code, le bilingue est capable de faire un usage maximal de tous les répertoires linguistiques à sa disposition pour référer au monde: il mélange les codes parce que l'énoncé «mixte» correspond mieux à la réalité qu'il veut décrire. En ce sens, l'exploitation du bilinguisme dans l'écriture littéraire peut être considérée comme un atout indéniable de l'écrivain.
Le cliché et sa fonction chez certains auteurs français contemporains.
Kaempfer, Jean
Le cliché en littérature, depuis le romantisme, est l’objet d’un discrédit constant de la part des écrivains cherchant à se démarquer de la production romanesque que Jauss appelle « culinaire », à grand tirage. A travers un parcours des œuvres des romanciers Olivier Rolin, Jean-Philippe Toussaint, Jean Echenoz et Eric Chevillard, on aura cherché à comprendre de quelle manière le cliché est appréhendé dans un cadre littéraire contemporain, plus particulièrement chez les écrivains « minimalistes » ou « ludiques » des éditions de Minuit. La tendance est double : d’une part le cliché absorbe toujours par sa connotation l’aspect dénotatif qu’il véhicule au sens propre, un sens propre qui, n’ayant plus de lien avec la réalité, ne peut plus être considéré au premier degré. C’est l’aspect négatif du cliché. Mais de plus en plus, celui-ci se voit réinvesti, réutilisé de diverses manières, inaugurant un nouveau statut du stéréotype en littérature grâce auquel le cliché retrouve une réelle fonction constructive, redevient une matière première positive. Celle-ci tend à effacer la vision moderne, péjorative, du cliché pour en imposer une autre, nécessaire à la création textuelle, voire réconciliée avec elle.
Ecritures du deuil. L’énonciation mise à l’épreuve dans Meidosems et Nous deux encore de Henri Michaux.
Adam, Jean-Michel
Ce travail interrogera la relation qui s’établit dans la pratique poétique de Michaux entre peinture et écriture au cours de l’année 1948. Durant la traversée d’une épreuve sans mesure, l’accident puis la mort de sa femme, l’écrivain, dessaisi de son pouvoir d’écrire, ne peut plus trouver refuge que dans la peinture. L’écriture ne viendra qu’en un second temps, pour que le deuil se dise et s’effectue en elle. Meidosems et Nous deux encore, fragments de prose poétique extraits de l’indicible, seules œuvres écrites durant cette année 1948, représentent deux moments comme deux formes de l’écriture du deuil. Meidosems et Nous deux encore seront abordés selon une perspective énonciative et pragmatique qui permettra de montrer comment un travail de deuil essentiel s’effectue dans ces textes. Les recherches fondatrices de Benveniste et de Jakobson posent le langage comme une activité essentiellement intersubjective au travers de laquelle un sujet se situe par rapport à l’autre, au monde, à son énoncé et à son énonciation elle-même. Dans l’expérience du deuil s'ébranle la triple articulation du sujet à l’autre, au monde et à la langue même. En tant qu’écrivain, le sujet l’éprouve au plus profond de son pouvoir d’écrire. L’enjeu de l’écriture du deuil consistera alors à retisser des liens à l’autre et au monde dans et par un acte d’écriture.
Michaux à l’épreuve du cercle. Eléments de géométrie subjective.
Rodriguez, Antonio
Il peut a priori sembler paradoxal de choisir la figure du cercle, d’emblée connotée comme pleine, close et achevée, pour aborder une œuvre aussi obsédée que celle d’Henri Michaux par le morcellement, le décentrement, cherchant inlassablement à échapper à tout enfermement à l’intérieur de formes fixes, à toute cristallisation définitive. Pourtant, ainsi que le révèle l’expression de Maurice Blanchot, « du fini qui est pourtant fermé, on peut toujours espérer sortir, alors que l’infinie vastitude est la prison, étant sans issue ; de même que tout lieu absolument sans issue devient infini. » C’est vers l’étude de cette lutte toujours renouvelée entre fini et infini, telle qu’elle apparaît problématisée dans le travail littéraire de Michaux des premiers écrits aux livres de la drogue, que nous entraîne la forme symbolique du cercle. Esquisser les contours du cercle, partant du modèle herméneutique élaboré par Georges Poulet pour penser les mutations de la subjectivité, c’est esquisser l’envers paradoxal du désir d’infini à l’œuvre dans les textes d’Henri Michaux.
Henri Roorda (1870-1925), écrivain suisse romand d’origine hollandaise, n’est que très peu cité dans la liste des théoriciens et réformateurs de l’enseignement moderne. Il a pourtant troublé leur univers en publiant plusieurs pamphlets pédagogiques, de 1898 jusqu’à l’année de sa mort. Influencé par les courants anarchistes qui se sont développés en Europe dans la deuxième moitié du 19e siècle, Roorda a compris l’importance de l’éducation dans la lutte sociale et s’est positionné durant toute sa vie en défenseur de l’enfance. Fidèle à la pensée de Rousseau et enthousiasmé par les expériences psychopédagogiques menées à Genève par Claparède notamment, il a collaboré à la tentative de pédagogie libertaire de l’Ecole Ferrer de Lausanne. Bien qu’il ait été professeur au Gymnase, Roorda n’a pas craint, dans ses textes, de s’en prendre violemment aux pédagogues, aux programmes scolaires et au rôle social joué par l’Ecole. Collègue et ami de Roorda, Edmond Gilliard a apprécié la finesse de son écriture, mêlant humour et pessimisme, et lui a consacré un hommage mérité en 1929 (A Henri Roorda), avant de s’essayer lui aussi à la parole pamphlétaire dans L’école contre la vie (1942).
Dire la variété du monde. Les Observations de Pierre Belon (1553).
Tinguely, Frédéric
La notion de varietas, omniprésente dans la pensée de la Renaissance, est à bien des égards insaisissable. Les Observations de Pierre Belon (1553), récit d’un voyage de trois ans dans le Levant, se prêtent à merveille à l’examen de cette notion. Dans le regard d’un philosophe naturel comme Belon, la variété s’avère d’une extrême ambivalence axiologique : si elle renvoie à la générosité du créateur, elle peut, parfois, constituer une menace. L’ « homme contemplatif » qui se « récrée » de la variété doit aussi opérer des « distinctions ordonnées ». De surcroît, certains domaines, comme la religion, s’accommodent mal de la pluralité : la varietas sort-elle indemne de son face-à-face avec la veritas ? Le genre du récit de voyage est également placé sous le signe de l’éclectisme : les Observations s’avèrent un véritable recueil de « singularités » (végétales, animales et anthropologiques). Mais le texte de Belon parvient-il pour autant à accueillir la diversité du monde ? Si le genre flirte avec un fantasme encyclopédique, une lecture énonciative met au jour les apories d’un programme intenable : tout dire et « éviter prolixité ».
Jean-Philippe Toussaint : une pratique postmoderne ?
Kaempfer, Jean
Dans le cadre de ce travail sur l’œuvre romanesque de Jean-Philippe Toussaint, nous avons tenté de montrer, à travers l’analyse narratologique des six romans publiés par l’auteur, en quoi l’œuvre de ce dernier pouvait être qualifiée de « postmoderne ». En partant du postulat selon lequel la littérature postmoderne serait caractérisée par la renarrativisation, nous avons confronté les textes de Toussaint à une définition précise du récit et observé qu’ils ne pouvaient être considérés comme tels (La Réticence mis à part). Les événements sont en effet organisés selon une logique de la successivité, au détriment d’une véritable mise en intrigue. Après avoir étudié le traitement de la temporalité dans les romans de Toussaint, nous avons constaté que le temps était bien le mode organisationnel de ces textes : il est exploité non seulement au niveau formel mais aussi thématique et stylistique. A partir de ce constat, nous avons replacé l’œuvre dans son contexte afin de montrer en quoi le traitement du temps dans les romans toussaintiens pouvait nous apporter une réponse quant au message plus général de l’œuvre. La vision du monde véhiculée par l’œuvre de cet auteur correspond-elle à l’époque dans laquelle elle s’insère ?
« Ne pas écrire etc. » : pratiques de la liste dans l’œuvre de Georges Perec.
Wyss, André
L’énumération est un trait stylistique saillant de l’œuvre de Georges Perec, et s’y manifeste fréquemment sous la forme listique. Mais le statut de la liste et sa lisibilité parfois problématique posent la question de son appartenance au champ littéraire. En parcourant le corpus selon les quatre axes de l’écriture de Perec définis par l’auteur (sociologique, autobiographique, oulipien, romanesque), ce travail se propose de montrer que la liste est indéniablement un objet littéraire et qu’elle ne peut être dissociée du reste de l’œuvre perecquienne, tant s’y retrouvent constamment les mêmes préoccupations, les mêmes thèmes, et des procédés d'écriture similaires. Ce mémoire cherche à dégager et étudier les multiples procédés de composition des listes et à rendre compte des effets contradictoires qu’elles peuvent produire sur le lecteur, tendues toujours entre vrai et faux, jeu et sérieux, lassitude et séduction.
La parole écarlate, L’Ensorcelée de Jules Barbey d’Aurevilly.
Chaperon, Danielle
Dans son roman L’Ensorcelée [1854], Barbey d’Aurevilly citerait en surabondance, jusqu’à saturation, la couleur rouge. C’est du moins l’impression de lecture, toute subjective, que laisse le roman, plus précisément celle d’un rougeoiement progressif de la diégèse. A l’analyse, il appert que de nombreux détails attirent l’attention du lecteur sur la couleur rouge, qui se voit exprimée progressivement par d’autre éléments, le feu et le sang. Les ramifications de la rougeur se révèlent complexes, le thème profondément enraciné dans l’imaginaire aurevillien, traduisant une vision précise de l’Histoire et de la métaphysique. La couleur est considérée comme un élément poétique (au sens bachelardien), ayant sa physique propre. C’est l’écheveau de songerie de la rougeur qui est démêlé, pour observer comment il sous-tend le récit et structure l’imaginaire de Barbey.
Maîtres et domestiques : rapports de force et de places dans les comédies de Molière.
Gollut, Jean-Daniel
La communication est le moyen par lequel les individus construisent entre eux des relations interpersonnelles. A cet égard, les échanges entre maîtres et domestiques occupent une place intéressante dans les comédies de Molière. La distance sociale qui sépare ces personnages est en effet linguistiquement marquée, les serviteurs devant se plier à des règles de politesse bien plus strictes et contraignantes que leurs supérieurs. Bien que les maîtres occupent théoriquement la place dominante en raison de leur naissance, il arrive que ce rapport de places devienne l’enjeu symbolique de l’interaction et qu’il soit modifié, donnant lieu à des situations inattendues et comiques. En effet, grâce à une maîtrise supérieure de la langue, le serviteur parvient parfois, grâce à des stratégies discursives, à se hisser à la position dominante de l’échange, prenant ainsi la place de son maître. Car au théâtre, « dire, c’est faire ». Mais, pour cela, les domestiques doivent exceller dans l’art de la communication et faire preuve d’ingéniosité et de tact dans le choix de leurs mots. Voilà ce que ce mémoire se propose de démontrer.