Difficultés d’emploi par des germanophones des temps du passé français. Etude de cas.
Adam, Jean-Michel et Alexander Schwarz
Ce travail a pour but de s’interroger sur les difficultés rencontrées par quelques étudiants germanophones face au problème épineux des temps du passé français. Basé sur plus d’une quinzaine de travaux de nature hétérogène, il ne prétend pas donner une quelconque vision d’ensemble ni apporter de solutions. Il vise plutôt à esquisser quelques pistes, à mettre le doigt sur les points qui semblent les plus confus. Ce mémoire est divisé en deux parties : l’une, théorique, expose tout d’abord les enjeux de l’analyse des erreurs ; puis développe les relations et caractéristiques des IMP, PS et PC ; et enfin, à l’aide d’une comparaison des systèmes verbo-temporels de l’allemand et du français, présente les problèmes auxquels sont susceptibles d'être confrontés les germanophones. Sur cette base, la seconde partie analyse les emplois erronés ou maladroits rencontrés dans le corpus. Cette étude aboutit à une conclusion qui rassemble les éléments découverts. Ce travail d’analyse pose d’autre part une question fondamentale : comment qualifier d’erroné le choix d’un temps, alors qu'il appartient au narrateur de décider dans quelle perspective le procès sera présenté ? Cependant, dans une situation d’apprentissage, les étudiants sont-ils toujours conscients du sens produit par leurs formes verbales ? L’effet de style créé résulte-t-il d'un choix délibéré ou d’une non-maîtrise de la langue ? Il est vrai que, dans un tel contexte, le choix du temps est déterminé non seulement par ce qui a été enseigné à l’apprenant et ce que celui-ci a compris du fonctionnement de la langue étrangère, mais aussi par des facteurs phrastiques et transphrastiques ainsi que par les aspects grammaticaux et lexicaux du verbe. La notion même d’erreur est alors remise en cause, et, avec elle, la question des limites de l’analyse des erreurs posée.
« S'il vous plaît... décris-moi Le Petit Prince ! » Approche linguistique de l'appartenance à la littérature enfantine et du genre du texte illustré de Saint-Exupéry.
Adam, Jean-Michel
Constatant que Le Petit Prince, livre illustré que Saint-Exupéry a publié en 1942, n’a pas un statut littéraire clairement défini, puisqu’on ne sait ni s’il faut le considérer comme de la littérature enfantine ni quel est son genre, ce mémoire a pour but de fournir des éléments de réponse à ces deux interrogations complémentaires en fondant en raison la littérature enfantine, - et à travers elle la littérature et la paralittérature -, et les genres littéraires. La littérature enfantine est une littérature à part entière (et non une paralittérature) qui, du fait de son public particulier, doit adapter sa manière d’écrire au moyen de techniques verbales (lexique, syntaxe, énonciation, thème) et visuelles (illustrations). L’analyse du Petit Prince met en évidence une volonté manifeste de simplicité, ce qui tend à signifier que les enfants sont les destinataires de cette œuvre. Néanmoins, le fait que la simplification ne confine pas au simplisme explique que le livre plaît également aux adultes. Plutôt que de le cantonner dans l’une ou l'autre littérature (enfantine, adulte), il est préférable de le considérer comme de la littérature transgénérationnelle, au double sens du terme : dans le texte (le petit prince et le narrateur adulte) et par la lecture (le double lectorat), il met en présence adultes et enfants, et ce au cours des générations successives. Les genres littéraires sont la norme, l'air de famille qu’un texte a avec un groupe de textes. Constatant que l’on ne parvient pas à obtenir un classement générique satisfaisant au niveau de l’ensemble « texte », il faut se résoudre à s’intéresser au niveau moins complexe de la séquence et discerner, dans chaque texte, une dominante séquentielle et des séquences spécifiques. Bien que l’on trouve l’éventail des séquences possibles dans Le Petit Prince (argumentative, explicative, dialogale, descriptive), la dominante est sans conteste narrative. Le Petit Prince peut être considéré comme la synthèse de trois genres, la parabole, le conte et la nouvelle, ce qui en fait un « paraconte réaliste ». Cette dénomination antithétique se veut l'écho de la logique fictionnelle du livre, seule habilitée à transmettre, dans les circonstances particulièrement cruelles de sa parution, le message : il est urgent de donner un sens à sa vie grâce aux relations humaines, invisibles aux yeux de chair mais essentielles.
Le genre épidictique dans la presse sportive suisse romande : étude sur Martina Hingis et Marc Rosset.
Adam, Jean-Michel
Le genre de l’épidictique est – selon la définition qu’en donnait Aristote dans la Rhétorique – le genre de l’éloge et du blâme. Le penseur de l’Antiquité confrontait ce genre, dans l’ouvrage précité, aux genres judiciaire et délibératif. Le genre épidictique a longtemps été considéré, par rapport aux deux autres genres, comme un genre mineur, plus proche du domaine du littéraire que de celui de la rhétorique. Depuis les années septante, les rhétoriciens et linguistes se sont repenchés sur l’étude de ce genre, démontrant tout d’abord qu’en louant ou blâmant une personne, un fait, l’orateur du discours épidictique promeut des valeurs. Ainsi, le genre épidictique a aussi un rôle social à jouer, au même titre que les deux autres genres. Cette perspective nouvelle du genre épidictique a relancé l’intérêt pour ce genre et depuis, l’appareil théorique s’est étoffé de nombreuses études. Notre mémoire se propose d’étudier un corpus d’articles de presse sportive en s’appuyant sur les théories épidictiques actuelles. Cette démarche a un aspect novateur dans le sens où les recherches sur le genre épidictique, pour étayer leurs théories, se basent sur des textes de l’Antiquité, ou sur aucun texte en particulier.
L’évolution des catégories verbales de l’indo-européen aux langues de la France médiévale.
Zufferey, François
Ce mémoire tente de retracer, de l'indo-européen aux langues d'oïl et d'oc médiévales, l'histoire des différentes catégories verbales : nombre, désinence, voix, mode, temps et aspect. Cette dernière catégorie, qui sert à montrer comment l'action exprimée par le verbe est envisagée dans son déroulement, fait par ailleurs l'objet d'un traitement nettement plus détaillé que les précédentes. Elle apparaît, en effet, au fur et à mesure que l'on remonte dans le temps, de plus en plus étroitement liée à la structure même des systèmes verbaux rencontrés. Le mémoire est organisé en trois parties : indo-européenne, latine et romane. Il s'agit tout d'abord de situer les faits latins au sein de la famille linguistique indo-européenne, en les comparant notamment avec ceux du sanscrit et ceux du grec ; puis d'examiner le latin lui-même, en distinguant autant que possible l'évolution de la langue écrite de celle de la langue parlée, dont sont issues les langues romanes ; et enfin de voir ce qu'il est advenu, en ancien français et en ancien provençal, de l'héritage latin..
La description chez Balzac : les bourgeois et leurs intérieurs dans César Birotteau.
Moret, Philippe
Balzac, dans La Comédie Humaine, a choisi de nous présenter différents milieux sociaux et en particulier ceux que forment la noblesse et la bourgeoisie, milieux qui se distinguent par des habitudes et des valeurs propres à chacun d’entre eux. Après avoir lu quelques œuvres de Balzac, nous avons constaté que c’est dans la décoration et dans l’ameublement des appartements que leur caractérisation se manifestait le plus clairement. Or, en règle générale, l’agencement d’une demeure est plus souvent le fait d’une seule personne que de tout un milieu social et c’est cette évidence qui nous a poussés à tenter d’analyser le lien existant entre le caractère d’une personne et les objets dont elle choisit de s’entourer. Cette relation caractère – choses étant médiatisée par les mots et par la fiction littéraire, nous avons décidé de confronter la description d’un intérieur balzacien et celle de son propriétaire, pour montrer, par le biais de l’analyse textuelle, comment cette relation fonctionnait et dans quel but notre auteur l’avait exploitée. Parmi les différents milieux sociaux qui cohabitent dans La Comédie Humaine, nous avons choisi de nous intéresser à la bourgeoisie, car c’est la classe sociale ascendante au dix-neuvième siècle, et plus précisément aux bourgeois de César Birotteau : en effet, cette œuvre offre une certaine variété dans la typologie de la bourgeoisie. Nous sommes ainsi successivement confrontés à César Birotteau, un bourgeois moyen qui tente d’accéder à la grande bourgeoisie, à Molineux un bourgeois moyen qui ne mérite pas sa place dans cette partie de la bourgeoisie et finalement à Claparon, un petit bourgeois qui feint d’appartenir à la grande bourgeoisie. Il s’est donc agi de montrer non seulement les différences qui existaient au niveau de leurs intérieurs et par conséquent de leurs caractères respectifs, mais surtout de mettre en évidence la façon dont Balzac nous a fait saisir ces différences.
Le Jardin comme lieu de la séduction dans quatre récits brefs du 18ème siècle. Bastide, La Petite Maison (1763) ; Boufflers, La Reine de Golconde (1761) ; Denon, Point de lendemain (1777) ; Marmontel, L’Heureux Divorce (1759).
Reichler, Claude
Partant de la conception du jardin comme un microcosme, une sorte de miroir dans lequel se reflètent les idées du monde, ce mémoire propose d’analyser la relation de séduction amoureuse que des personnages développent dans ce lieu particulier. Le jardin étant défini comme un lieu des plaisirs, sa fonction principale est, dans ces récits de séduction, de faire naître le désir, en particulier à travers les différentes sensations visuelles, acoustiques ou olfactives que ses éléments végétaux et architecturaux provoquent. Dans ces récits, l’un des personnages, le séducteur, utilise le jardin comme un moyen pour atteindre son but, séduire l’autre. Il le fait essentiellement à travers la mise en scène de ce lieu, en organisant la découverte du jardin comme une succession d’événements et de surprises dont l’effet recherché est d’amener l’autre dans un état où il n’est plus maître de ses sentiments. Mais le jardin ne sert pas seulement de cadre au jeu de la séduction car il accède parfois au statut d’acteur et influence donc directement à l’évolution de la relation de séduction.
La ville-piège. Une vision de la ville au milieu du XXe siècle, d’après L’Emploi du temps de Michel Butor et Les Gommes d’Alain Robbe-Grillet.
Reichler, Claude
Dès le XXe siècle, les écrivains commencent à envisager la ville comme un langage textuel. S’ensuit un phénomène de contamination réciproque entre une ville perçue comme texte, et un texte qui évoque la ville. Cette dernière devient alors plus que le simple cadre d’une narration, et commence à structurer le texte, sur lequel se reflètent ses contradictions. La ville imaginaire, que proposent Michel Butor et Alain Robbe-Grillet à leurs lecteurs, se révèle être une ville-piège, et cela doublement parce qu’elle produit, chez les personnages, la perte des repères intérieurs et extérieurs. Pour décrire cet espace désorientant les deux écrivains utilisent de nouvelles structures romanesques, annonçant par là que les anciennes ne sont plus à même de représenter une réalité devenue multiple et fragmentée. Une réflexion historique et un parcours thématique de leurs deux œuvres s’avèrent donc indispensables pour appréhender le type particulier de représentation urbaine qu’élaborent les deux romanciers.
Dans ce mémoire, j’essaie de mettre en place une catégorie du genre dit "fantastique" : l’insolite. Cinq récits me permettent d'établir cette nouvelle notion (1) : Sur l'eau et La Nuit de Maupassant, Dimanche après-midi torride de l’écrivain belge Franz Hellens, Minuit de Julien Green et enfin Au Château d’Argol de Julien Gracq. L'insolite appelle avant tout la vraisemblance du récit et en particulier du décor : les textes choisis reposent sur la mise en scène de décors inattendus et déconcertants, mais plausibles. Essentiellement obscur, le décor insolite exacerbe la peur des personnages: sous l'influence des sens et de l’imagination, les phénomènes naturels occupent, dans l’obscurité, un espace placé sous le signe de la menace et de la prémonition. A l’aspect négatif des ombres et des ténèbres, se juxtapose pourtant une valeur positive liée à l’attrait : l’ambivalence face au décor insolite forme une composante majeure des récits choisis. L’insolite mobilise finalement le silence du décor et la solitude du personnage. L’intérêt du corpus réside dans la variété des décors présentés par les écrivains : Dans Sur l’eau, un canotier reste immobilisé dans sa barque et observe, angoissé, le décor insolite de la brume qui soffre à lui. Minuit plonge le lecteur dans le décor inquiétant des jeux d’ombre et de lumière d’une étrange demeure. Au Château d’Argol présente la nature comme élément constitutif principal de l’espace insolite gracquien. Enfin, le travail distingue deux catégories de décors insolites : dans Sur l’eau, La Nuit et Dimanche après-midi torride, l’insolite provient d’un espace familier qui, soudain, se teinte d'équivoque : le personnage évolue au sein d’un espace qu’il connaît, voire qu'il chérit mais qu'il ne reconnaît plus. Dans les deux derniers récits, l’insolite fait appel à un décor inconnu que le personnage découvre.
Eugénie Pradez : l’encre d’une éthique et d’un milieu social.
Maggetti, Daniele
Eugénie Pradez, femme de lettres romande, est née à Liège en 1848 et décédée à Lausanne en 1932. Ancrée dans un milieu libriste, fille d’un pasteur renommé et membre d’une famille au capital culturel important, Eugénie Pradez était une personnalité aux principes moraux affirmés. Son œuvre qui témoigne d’une vision de l’existence et de l’humanité, héritée de son milieu social et religieux, ne peut être qualifiée d’édifiante, bien que cela soit le but recherché. En effet, les récits de l’auteure mettant en scène des personnages confrontés aux dangers de l’existence invitent implicitement le lecteur à reconsidérer son comportement et prennent ainsi des allures de paraboles. Les valeurs incarnées par les personnages se révèlent ainsi plus significatives que l’intrigue, qui ne fournit qu’un cadre aux faits psychologiques. Eugénie Pradez a connu dès ses premières nouvelles un vif succès, car elle satisfaisait aux critères de la critique en place : art et moralité. Le soutien du critique neuchâtelois Philippe Godet en témoigne. Ce mémoire retrace le parcours de l’auteure, son appartenance à un certain milieu social et met en évidence les caractéristiques principales de son œuvre.
Sociolinguistique et échec scolaire : la théorie des deux codes.
Adam, Jean-Michel
S’intéressant à l’échec scolaire des couches défavorisées de la population, le sociologue Basil Bernstein postule l’existence de formes de langage différentes dans les diverses couches de la population. Les couches supérieures utiliseraient un langage explicite (qui peut être compris sans le contexte dans lequel il est produit) et les couches inférieures un langage implicite (qui ne peut être compris que par référence au contexte dans lequel il est produit). Dans le premier cas on parle de code élaboré, dans le second cas de code restreint. L’échec scolaire des couches défavorisées viendrait de ce que le code restreint limite l'accès au raisonnement abstrait, le raisonnement étant guidé par les structures linguistiques. En fait, la théorie des deux codes paraît peu crédible. Le discours restreint décrit par Bernstein ne s’observe ni dans les textes que les élèves produisent à l’école, ni dans les activités verbales qu’ils pratiquent dans la rue. Le problème vient de ce que Bernstein tient pour représentatifs des échantillons de discours obtenus en situation expérimentale, situation problématique. Cependant une explication sociolinguistique de l’échec scolaire reste possible, mais en d’autres termes. L’échec s’explique par les conflits entre les structures de surfaces des différentes formes de langage, ainsi que par ceux portant sur les valeurs sociales qui leur sont rattachées.
Vision et poétique romanesques : une lecture rétrospective de Jean Rouaud.
Adam, Jean-Michel
En 1999 Jean Rouaud publie Sur la scène comme au ciel, volume qui, à en croire la quatrième de couverture de l’édition originale, met un terme à sa « suite romanesque », commencée en 1990 avec Les champs d’honneur. Au travers de ce qu’il nomme lui-même une « comédie de commentaires », l’auteur affiche sa volonté de revenir sur ses romans précédents et d’en expliquer les recoins obscurs. Or, par le biais de cette relecture, c’est non seulement ses écrits, mais surtout son écriture (au sens de « procédé de création ») qu’il met en lumière. Ainsi apparaît un véritable art poétique à l’intérieur même de l’œuvre romanesque de Rouaud. L’enjeu de ce travail de recherche a donc été de reconstituer les différents aspects de cet art poétique, fils d’Ariane aboutissant à la (re)découverte d’un auteur à considérer avant tout comme un stylisticien…
Au début du XXe siècle, Maurice Renard est l’un des rares écrivains français à prendre la relève de la littérature d’anticipation scientifique après Jules Verne. Grand admirateur de H. G. Wells, il se consacre à ce genre nouveau, né de la rencontre de la science et du fantastique, et lui donne le nom de « merveilleux scientifique ». A la fois précurseur de la future science-fiction et héritier d’une tradition littéraire, il convoque souvent dans ses romans et nouvelles la figure mythique du savant fou, illustrée pour la première fois par Frankenstein ou le Prométhée moderne de Mary Shelley (1817). Cet archétype de l’homme de science dévoyé lui permet de condamner les excès d’un positivisme trop confiant, à une époque où les progrès de la science inquiètent autant qu’ils fascinent. Mais le romancier ne s’est pas contenté de reproduire un modèle littéraire déjà très codifié. A travers les nombreux avatars du savant fou qui peuplent son œuvre, il nous livre une interprétation très personnelle de la folie savante. Avant que le cinéma en fasse un cliché, Maurice Renard lui donnait une résonance bien plus menaçante, en considérant qu’il n’y a pas de savants fous, car tous les savants sont fous.
La « nouvelle-instant », un cas-limite de narrativité ? L’exemple de deux nouvelles d’Albert Camus.
Adam, Jean-Michel
Ce mémoire prend pour point de départ la notion de « nouvelle-instant » proposée par le critique René Godenne dans ses travaux sur la nouvelle moderne. Selon Godenne, « certains auteurs [notamment Marcel Arland ou Albert Camus] ne prétendent plus vouloir raconter une histoire en bonne et due forme, mais ramènent le sujet de la nouvelle à la seule évocation, et à l’approfondissement, d’un instant précis de vie (...). La notion n’inclut pas - ou si peu - une idée narrative ». Le but du travail est de reprendre ces hypothèses sur la narrativité pour tenter de les affiner théoriquement et de les mettre à l’épreuve d’une approche linguistique de deux nouvelles tirées de L’Exil et le Royaume d’Albert Camus (La femme adultère et Les muets). La première partie est entièrement consacrée à une mise au point théorique où les termes-clés d’instant, d’action et de mise en intrigue sont soumis à une tentative de redéfinition. La deuxième partie s’ouvre quant à elle à une analyse stylistique des nouvelles du corpus. L’enjeu central est de montrer que la dilatation temporelle dans l’instant va de pair avec un effritement de l’action humaine et de son organisation textuelle par la mise en intrigue. Les nouvelles camusiennes apparaissent alors comme des cas-limites de narrativité où le récit est fondamentalement décevant. Ce mémoire vise ainsi à une réflexion sur le processus de dénarrativisation à l’oeuvre dans la « nouvelle-instant » par une approche située au carrefour de la poétique de la nouvelle, des théories du récit et de l’action, ainsi que d’une stylistique linguistique.
La figure de l’Autre à travers une variation épistolaire : Prague d’Étienne Barilier.
Jakubec, Doris
Le roman épistolaire d’Étienne Barilier, Prague (1979), fait partie d’un vaste ensemble romanesque qui se présente dans son entier comme un laboratoire de formes où sont expérimentés les possibles narratifs et défiées les formes romanesques traditionnelles. Cette exploration formelle s’articule étroitement avec la réflexion sur l’Autre et le sujet qui travaille chaque œuvre de l’auteur. Dans Prague, Barilier adopte un parti pris narratif singulier, qui fonde la signification et la richesse du texte : il réactualise la forme ancienne du roman par lettres pour la problématiser, en créant une polyphonie unilatérale, où toutes les lettres du personnage à qui écrivent différents épistoliers sont cachées au lecteur. Ce choix formel, lié à la question de la subjectivité, permet au romancier de mettre en scène la problématique du sujet, de l’identité et de l’altérité, en créant de multiples jeux de miroirs entre le « je » et le « tu ».