Les genres discursifs dans Fortunio de Théophile Gautier : tension fictionnelle et co-énonciation.
Adam, Jean-Michel
Notre mémoire de licence éclaire ce que nous pouvons appeler la généricité, c’est-à-dire le caractère rarement monogénérique des textes et plus encore, presque par définition, du roman, particulièrement si nous envisageons ce dernier comme un hypergenre. Cette thèse sera illustrée grâce à l’étude détaillée d’un roman de Théophile Gautier, Fortunio, publié en 1837. Plus précisément, on analysera comment ce texte recycle, transgresse ou détourne deux genres propres au XVIIIème siècle : le roman libertin et le conte de fées. Cette analyse nous permettra, en outre, de répondre à trois autres questions qui sont intrinsèquement liées à la question de l’hétérogénéité architextuelle romanesque. Quel est le rôle du lecteur dans l’actualisation et le repérage de ces différents genres ? On essayera ainsi de déterminer quel lecteur modèle Fortunio dessine. Ensuite quelle est l’influence du contexte particulier des années 1830-1840 dans la construction multigénérique de Fortunio ? Dans cette optique le contexte fera partie des conditions d’interprétation du texte. Enfin, nous regarderons comment les relations architextuelles du roman de Gautier jouent sur ce que nous avons appelé la tension fictionnelle. Nous entendons par-là le savant dosage qui est entretenu par les différents genres entre d’une part l’oubli du lecteur dans la diégèse, ce que J.-M. Schaeffer appelle « l’immersion fictionnelle » et d’autre part la posture de distanciation où le lecteur au contraire prend un recul critique avec l’histoire et les personnages.
Sept poèmes indiens de Leconte de Lisle. Réécriture de la littérature sanskrite.
Rodriguez, Antonio
Les poèmes indiens qui figurent en tête des Poèmes antiques de Leconte de Lisle et datent du milieu du XIXe siècle, sont des réécritures de textes religieux de l’Inde ancienne. L’interprétation littéraire comparée des poèmes et de leurs sources selon le paradigme générique permet de mieux comprendre les enjeux de l’écriture poétique de Leconte de Lisle. L’hiatus contextuel qui sépare trois monuments de la littérature sanskrite, traditionnelle, religieuse et sept poèmes aux seules fins esthétiques et écrits à l’époque où se constitue l’autonomie de la littérature française, est décelable dans les textes mêmes. La stratégie de l’énonciation, la composition textuelle, la relation intertextuelle et l’emploi des personnages portent les traces comparables de mutations génériques. Relever différences et identités entre les poèmes indiens et leurs sources indiennes permet aussi de préciser le projet poétique de Leconte de Lisle.
« Accéder à l’authenticité en partant d’une imposture, avouez que ce serait assez beau ! ». Ajar ou la mise en œuvre de l’imposture. De Pour Sganarelle à Pseudo.
Cernuschi, Alain
Le but de ce travail est de montrer comment il est possible de parvenir à réaliser le projet paradoxal d’accéder à l’authenticité à partir de l’imposture. La première partie de ce travail portera principalement sur Pour Sganarelle qui selon nous permet de mieux comprendre ce que signifie un tel projet pour Gary. L’essai qu’il écrit en 1965 développe en effet la théorie d’un roman total dont Gary dit lui-même que l’aventure d’Emile Ajar en est la réalisation. Nous commençons donc par étudier ce que représente le roman total pour Gary afin de voir par la deuxième partie de ce travail si l’œuvre d’Emile Ajar en est bien la réalisation. Cette deuxième partie est en effet constituée d’une analyse de Pseudo qui tente de montrer comment celui-ci réalise le versant fictif des thèses de Pour Sganarelle.
La représentation de la guerre dans le théâtre du XVIIe s. : dramaturgie de l’ « invisible ».
Chaperon, Danielle
La guerre incarne un sujet littéraire passionnant mais difficile à traiter. Parmi tous les genres, le théâtre semble le moins apte à accueillir le thème de la guerre puisqu’il implique une représentation : la guerre paraît trop grande et trop écrasante pour la scène. Cette incompatibilité fondamentale se voit encore augmentée au dix-septième siècle : en effet, les règles de la doctrine classique qui s’établissent progressivement finissent par interdire toute forme de violence sur scène, réduisent le temps, le lieu et l’action, pour ne laisser que peu de possibilités au déroulement des combats. Mais la guerre trouve toutefois sa place dans les pièces. Les dramaturges doivent alors intégrer le sujet dans la construction logique de l’intrigue, au niveau de l’inventio, en modifiant ses caractéristiques temporelles. Au niveau de la dispositio, ils ont recours au hors-scène et gèrent l’éloignement spatial des conflits. Sur scène, la guerre se transmet par le discours des personnages : les récits de combats varient sur de nombreux critères, selon que la guerre racontée a lieu avant le début de la pièce, pendant les entractes ou dans le hors-scène simultané à l’action scénique.
Devenir soi quand on n’est rien : orphelines et paysans dans les romans de Marivaux.
Reichler, Claude
Une source à la fois d’inquiétude et d’intérêt pour les classes dominantes, au dix-huitième siècle, reste suscitée par les individus de "naissance obscure". Cette notion ne renvoie pas simplement à l’appartenance au Tiers-état, mais au monde inconnu de l’origine, qu’incarnent autant la femme que le paysan. Ce sont ces deux figures énigmatiques qui prennent la plume dans les romans-mémoires de Marivaux, passés à la postérité : l’orpheline de La Vie de Marianne et Jacob dans Le Paysan parvenu. Mais dans ces œuvres, la vraisemblance du narrateur se trouve ruinée par l’inachèvement de son récit : son ascension sociale est contredit par le rappel incessant du néant de ses origines, dont il n’est pas possible d'émerger dans la réalité de l’époque. Le lecteur peut toutefois accorder à Marianne, l’enfant trouvée, le bénéfice du doute : elle a le droit de s’imaginer une plus haute naissance. En fait, ce qui intéresse Marivaux, c'est de raconter "l’histoire d'une conscience" (Robert Mauzi, "Marivaux romancier", p. 14) avant qu'elle ne se fonde dans le corps social. Mais comment devenir soi quand on n'est rien ? C'est surtout la genèse du lien entre récit personnel et naissance obscure que je me suis proposé d'analyser. J’ai donc ajouté à mon corpus trois œuvres de jeunesse : dans Les Effets surprenants de la sympathie, Pharsamon et Le Télémaque travesti, des orphelines et des paysans apparaissent, qui effectivement racontent leur vie. Et il faut constater que, déjà, leur récit émerge du néant pour se perdre ensuite dans le texte, créant un appel d’air dans la cohésion du roman, ou constituant au contraire une cohérence isolée au sein d'un univers grotesque. C’est dans ce contexte que se déploie la naissance obscure dans toute sa polysémie, avec les phases naissance, connaissance, renaissance et reconnaissance que l’on retrouvera dans les mémoires de Marianne et celles de Jacob.
Alain Souchon : vers une expression moderne et populaire de la mélancolie.Etude de quelques procédés stylistiques.
Wyss, André
Depuis trente ans, Alain Souchon enchante notre quotidien de ses refrains aux accents mélancoliques. La longévité de sa carrière et la reconnaissance des professionnels – il est le chanteur le plus primé de l’histoire des Victoires de la musique – font de lui un auteur-compositeur-interprète profondément populaire. Mais au fond, qu’est-ce qui fait le talent et l’originalité de cet artiste ? « Populaire » est-il un gage de qualité ? L’étude des textes de ses chansons, d’un point de vue stylistique, révèle l’exigence d’écriture de cet auteur. Les noms propres, le langage familier, une syntaxe débridée et un travail métaphorique particulier constituent le style « Souchon ». L’auteur fait un usage personnel et original de ces formes, qui reflètent par ailleurs la mélancolie de ses textes. Souchon, par ses choix esthétiques, donne à voir une image originale et unique de la mélancolie, celle d’une affection « moderne » et « populaire » qui, bien plus que la pathologie individuelle du poète, est en fait une pathologie sociale, celle dont souffre la société moderne.
Le handicap en ses miroirs : portrait de la déficience par elle-même.
Meizoz, Jérôme
Le présent Mémoire a pour objectif principal de présenter une figure relativement récente de la littérature : l’écrivain handicapé. Pour ce faire, il se base sur un corpus dont les différents ouvrages sont les productions d’écrivains qui, pour la plupart, souffrent d’un handicap qui rend leur rapport à l’écriture moins aisé que pour l’écrivain ‘traditionnel’. L’analyse de ces textes s’organise selon quatre axes principaux. Un premier chapitre est relatif à la construction, par les différents auteurs, de la notion de handicap ; l’objet de ce chapitre est également d’étudier de quelles manières les écrivains justifient leur droit à la parole. Vient ensuite un chapitre sur les différents ‘masques’ qui peuvent être attribués à la personne souffrant d’un handicap, qui correspondent aux diverses étapes de son évolution. L’étude se poursuit sur une réflexion concernant l’acte d’écriture lui-même, ainsi que sur la nature de ses productions. Enfin, le dernier chapitre analyse le message, ou plus précisément les messages que ces écrivains cherchent à faire passer à travers leurs ouvrages.
Alexandre Dumas : Conteur et Voyageur. Impressions de voyage en Suisse (1833).
Reichler, Claude
Alexandre Dumas (1802-1870), contraint en 1832 de quitter Paris pour échapper au choléra et à la prison, décide de faire un voyage en Suisse, pays visité avec ferveur dès le XVIIIe siècle. C’est un jeune homme brillant : son drame Anthony fit scandale dans toute la France. Mais Dumas est encore au début de sa carrière. Il recherche une nouvelle inspiration, afin de se frayer un chemin dans la littérature et dans le monde. Les Impressions de voyage en Suisse révèleront cet écrivain hors pair. Sous sa plume, récits historiques et légendaires, anecdotes, aventures personnelles et descriptions de paysage se mêlent avec art. De même, fantaisie, drame et humour s’entrechoquent continuellement. La Suisse, par sa variété géographique (bourgades, lacs, plaines, montagnes, vallées, etc.), se prête parfaitement à ce mélange hétérogène. Dumas y rencontre personnages illustres, paysans et étrangers. Tous contribuent, par leurs récits personnels, à rendre l’œuvre de Dumas attrayante, originale et débordante de vie.
L’interculturalisme dans les mémoires d’Amadou Hampâté Bâ.
Meizoz, Jérôme
Amadou Hampâté Bâ ayant vécu en Afrique, au Mali, de 1900 à 1991, il est sans conteste l’un des témoins les plus importants de l’histoire du continent africain, du processus de colonisation à l’indépendance. Dans ses mémoires, il nous raconte sa vie ; sa petite enfance et son éducation traditionnelle dans l’ethnie peule, puis son passage à l’école française et les différents postes qu’il a occupés dans l’administration coloniale. Il a hérité de deux cultures qui se sont opposées et sont encore en contradiction dans certains domaines. Elles furent surtout considérées longtemps comme inégales. La culture du colonisateur était présentée comme la culture de la civilisation face à une culture africaine considérée comme « primitive ». Pourtant c’est en français et dans un genre qui plonge ses racines en Occident qu’Hampâté Bâ revendique sa culture africaine, et tente même de promouvoir et de défendre la perpétuation de certaines coutumes. Une tension réside dans ce choix de défendre sa culture africaine face à la culture française tout en utilisant la langue et le genre d’une littérature occidentale. Mon travail se focalise sur cette tension que l’on retrouve dans l’écriture de ses mémoires à plusieurs reprises, malgré la volonté de l’auteur de minimiser, voire d’effacer le conflit de loyauté devant lequel il se retrouve sans cesse.
Eclats d’enfance. 16 écrivains racontent leur enfance algérienne…
Cordonier, Noël
L’Algérie coloniale, française, fait partie d’un passé révolu, lointain et partiellement oublié. Sa survie au cœur de la mémoire est possible uniquement grâce aux souvenirs de ses acteurs, de ses enfants. Réunissant seize auteurs de confessions, d’origines et de cultures différentes ayant grandi en Algérie, le recueil de nouvelles Une enfance algérienne constitue à cet égard un ouvrage particulièrement riche et inouï. Nous avons tenté, au cœur de ces fragments d’enfance autobiographiques, de comprendre quelle vision de la terre natale les écrivains ont choisi de transmettre. Ainsi s’est dévoilée, au cœur d’une intense et très riche variété de tons, de styles et de langues, une Algérie tantôt sereine et heureuse, tantôt meurtrie par la haine et la violence. Une Algérie presque mythique, presque irréelle aujourd’hui, mais que tous ont profondément aimée et à laquelle leur texte rend une véritable hommage.
Analyse du discours publicitaire sous l’angle de la pyramide des besoins de Maslow.
Lugrin, Gilles et Adam, Jean-Michel
La publicité utilise différents procédés afin d’influencer le consommateur. L’exploitation des besoins fondamentaux de l’homme peut en faire partie. A partir de la pyramide des besoins de Maslow, ce travail tente de montrer l’écart qui peut exister entre les besoins qu’un produit satisfait et ceux que le discours publicitaire construit. Maslow, psychologue des années cinquante, a défini cinq besoins fondamentaux humains (les besoins physiologiques, les besoins de sécurité, les besoins d’amour et d’appartenance, les besoins d’estime et le besoin d’accomplissement de soi). Notre travail tente d’actualiser ces besoins dans l’analyse du discours publicitaire. Notre corpus est formé de publicités pour les eaux minérales plates en bouteille, les petites voitures, les cigarettes et les montres de luxe. Ces produits répondent presque tous objectivement à des besoins humains spécifiques, mais ce ne sont pas forcément ces besoins que la publicité exploite. Par l’analyse du discours publicitaire, ce travail met en avant les besoins que les marques utilisent afin de se créer une image et de se positionner sur le marché.
Si Marguerite Yourcenar définit Alexis tel le portrait d’une voix, ce mémoire se profile comme une esquisse de l’auteur à l’œuvre, c’est-à-dire en fonctionnement mais aussi en contexte et donc dans la durée. A travers une lecture croisée d’Alexis et de sa préface, ce travail espère éclairer la communion d’intérêts dans la quelle se rencontrent, mais peut-être aussi s’affrontent, l’écrivain et son personnage, l’auteur et le narrateur. La question homosexuelle, qui sous-tend le récit, sert de fil conducteur à une réflexion visant à démontrer l’importance de la prise de parole en tant que moyen d’invention et d’affirmation de soi par rapport à un discours socialement et culturellement dominant.
L’Œuvre dramatique de Maurice Maeterlinck. Vers une réconciliation des deux périodes.
Chaperon, Danielle
L’œuvre dramatique de Maurice Maeterlinck (1862-1949) surprend par l’apparente séparation entre les drames antérieurs et ceux postérieurs à 1900. La critique les a divisés sous les titres de premier et deuxième théâtre, ne s’intéressant néanmoins qu’aux premiers drames. Il est vrai que ces derniers introduisent une dimension totalement nouvelle dans l’univers dramatique de la fin de siècle, s’éloignant des pièces de boulevard et naturalistes en vogue à l’époque pour faire naître le théâtre symboliste. Quant à la deuxième période dramatique, elle rejoindrait des thématiques et une dramaturgie beaucoup plus traditionnelles qui, selon la critique, rompent radicalement avec les premiers drames. Partant de ce constat, ce travail s’efforce de réhabiliter l’intérêt de la dramaturgie du deuxième théâtre, en tentant de découvrir si la séparation a réellement lieu au niveau thématique comme au niveau dramatique.
Qui n’a jamais entendu parler d’« un Casanova », ce nom propre devenu de nos jours un nom commun qui signifie séducteur sans scrupules et tombeur de femmes ? Ce Casanova-là n’a rien de commun avec le Casanova qui vécut au siècle des Lumières et qui nous intéresse dans ce mémoire. Il s’agira en effet de dévoiler le vrai visage et la profonde personnalité de cet homme. Loin de le réduire à un simple séducteur sans aucun égard pour les femmes, comme l’ont souvent fait de nombreux critiques, il faut voir en lui un homme généreux, bon, sincère, attentionné et altruiste. Dans l’Histoire de ma vie, Casanova développe une conception du bonheur qui l’accompagne tout au long de son existence. Cette conception-là est à mettre en parallèle avec l’idée de don que développe le philosophe français Jacques Derrida. Dans ses Mémoires, Casanova cherchera sans cesse à faire le bonheur autour de lui.
La démocratie en images : approche générique et sémiotique de l’affiche électorale.
Lugrin, Gilles
Ce travail conjugue deux approches, distinctes mais – et c’est une des bases de notre problématique – complémentaires, de l’iconotexte électoral : les approches génériques et sémiotiques. Le corpus qui lui est attaché se compose des affiches vaudoises des élections au Conseil national et au Conseil des Etats d’octobre 2003. L’approche générique cherche à mettre en lumière une série de caractéristiques récurrentes de l’affiche électorale et étudie sa relation au contexte, aux conditions de production et de réception, à l’usage qui en est fait et aux pratiques qui y sont rattachées. D’un point de vue générique, l’affiche électorale peut être réduite à l’expression d’un macro-acte de langage, que nous formulons ainsi : [Votez pour X]. La contrainte de conformité au genre et la réussite de l’acte de langage, déterminent des formes et des contenus que nous observons dans le corpus. Une fois défini ce que les affiches du corpus ont en commun, ce sur quoi se fonde précisément leur appartenance au genre affiche électorale, il nous faut nous demander en quoi celles-ci se distinguent-elles les unes des autres, ce qui fait, où se fait et comment se fait leur spécificité. L’analyse sémiotique cherche à mettre en lumière les stratégies de communication mises en place au sein des iconotextes : comment les différents éléments constitutifs récurrents (propres au genre) sont traités et articulés dans les affiches du corpus ; de quelle manière se construit l’argumentation électorale propre à chaque parti à travers les systèmes sémiotiques linguistiques, iconiques et plastiques. La somme de ces deux approches met en lumière une tension entre une rhétorique de séduction (plaire pour s’assurer le vote), synonyme d’invention et d’identité, et la sobriété d’une pratique discursive institutionnelle et particulièrement normée, tant socialement que matériellement.
L’oeuvre poétique de Monique Laederach : de l’écriture du corps à la récriture des mythes (La Partition, Si vivre est tel, Ce chant mon amour).
Cossy, Valérie
Ce mémoire porte sur les trois derniers recueils de poèmes écrits par Monique Laederach, écrivaine romande, décédée en 2004 : La Partition (1982), Si vivre est tel (1998) et Ce chant mon amour (2001). Il s’agit, à travers une perspective de lecture genrée, de donner un contexte précis à l’élaboration du premier recueil. Autrement dit, j’ai voulu rendre compte de l’inscription de cette oeuvre poétique et de son autrice dans le débat très controversé sur une éventuelle existence de l’écriture féminine, c’est-à-dire sur une différence de l’écriture qui s’ancre dans le corps de la femme en tant qu’élément qui la rend irréductiblement différente. C’est bien cette revendication d’une écriture du corps féminin qui constitue le point de départ de La Partition comme recherche d'une voix féminine entière passant par la rappropriation de son propre corps. Les deux recueils suivants sont lus comme étant une continuation de cette recherche amorcée et aboutissant à la récriture des mythes tels que les couples Eros-Psyché et Orphée-Eurydice d'un point de vue féminin et à l’établissement d’une voix lyrique et féminine autonome à travers la figure d’Eurydice. Or, ce débat sur l’écriture féminine, qui a débuté dans les années 1970 en France au sein du mouvement différencialiste mené, entre autres, par Hélène Cixous, est actuellement perçu comme dépassé et régressiste du point de vue de l’actuelle critique féministe de tendance constructiviste. Accorder une plus grande visibilité à une oeuvre mise à l’écart non seulement par la critique traditionnelle mais également par la critique féministe, tout en montrant son infinie complexité, étaient ma préoccupation.