Jeu linguistique au Moyen-Age : de l’influence du français sur la langue anglaise et de l’intégration anglaise de la langue française dans le cas particulier de la traduction du Roman de la Rose par Geoffrey Chaucer.
Le marcheur et la ville. Réenchanter l’espace dans Les Ruines de Paris, La Liberté des rues et Le Citadin de Jacques Réda.
Reichler, Claude
Ce mémoire propose une lecture de Jacques Réda à travers la figure du flâneur, héritée de Baudelaire et de la modernité, figure largement commentée par Walter Benjamin. On s’intéressera à la représentation de la ville chez Réda, à la fois lieu surmoderne et lieu commun. A travers les lieux de la ville et le temps, à travers la marche, on retrouve une thématique et une esthétique du lien. En s’interrogeant sur la lecture et l’écriture, qui sont véritablement au cœur de la problématique du flâneur, on voit émerger la figure d’un flâneur chiffonnier qui tente de sauver du naufrage ce qui peut l’être, qui tente de faire sens alors que le temps même engloutit ce sens. L’image de récupération, de réappropriation, est au centre des textes de Réda, constamment à la recherche de la rencontre, de l’échange, du dialogue. Le réenchantement s’opère à travers la marche et à travers l’écriture qui devient elle-même un trait d’union entre les temps.
Expérience de l’espace et écriture chez Jacques Lacarrière.
Reichler, Claude
Jacques Lacarrière (1925 – 2005) a été parmi les pionniers en France du mouvement dit de « travel writing » et donnait régulièrement des conférences au festival « Etonnants voyageurs » de Saint-Malo. Dans ses deux grands récits de voyages, Chemin faisant (1974) et L’Été grec (1976), il met en place son propre art du voyage et de l’écriture, au sein duquel le rapport entretenu avec l’espace et en particulier avec le paysage joue un rôle essentiel. A la lumière de théories paysagères comme celle d’Augustin Berque et de la phénoménologie, nous nous sommes attachés à montrer l’importance assignée au corps dans l’appréhension de l’espace, faisant de celle-ci une véritable expérience vécue, incarnée. Mais nous avons également pu observer l’intervention d’autres facteurs favorisant une « rencontre du monde » réussie. Toujours sous l’éclairage de la problématique paysagère, nous avons ainsi abordé les questions de la disponibilité, des références culturelles, de la fonction du mouvement imprimé par la marche, des effets du hasard et de la surprise. Par ailleurs, l’expérience spatiale est inséparable de la perception temporelle, que Lacarrière considère comme le principal bouleversement du voyage. Nous avons donc tenté de mettre en évidence comment le temps et la mémoire – personnelle ou collective – interviennent de manière décisive, au moment de l’expérience comme dans la façon qu’a l’auteur de penser cette dernière. Enfin, Lacarrière se veut écrivain autant que voyageur. Après avoir analysé son discours sur la marche, le voyage et l’écriture, nous avons recherché la trace de ce discours dans les textes, en nous demandant comment celui-ci influence l’écriture. Comment l’expérience même du paysage ou de l’espace est-elle transmise dans le texte, ou dans quelle mesure l’écriture traduit-elle une certaine attitude revendiquée face au paysage ? La notion de « cheminement », omniprésente dans l’œuvre de Lacarrière, nous a accompagnés tout au long de notre travail.
L’émergence du fictionnel dans La Pêche miraculeuse de Guy de Pourtalès. Une étude génétique comparée des premiers chapitres des manuscrits autographes.
Jakubec, Doris
Les manuscrits du début de La Pêche miraculeuse de Guy de Pourtalès présentent quatre phases d'écriture, au sein desquelles sont visibles trois modes d'énonciation différents. L'étude de ces variantes permet de suivre la démarche de l'auteur et de constater comment, entre 1933 et 1937, il change radicalement de but: de ce qui devait être, au départ, une autobiographie, il fait un roman, une vaste fresque sociale n'ayant en apparence que peu de rapports avec sa propre vie. La transcription de ces manuscrits constitue la partie majeure de mon travail : elle sert de base à l'étude comparée des différentes étapes de rédaction de La Pêche miraculeuse, étude qui profite des outils de l'analyse thématique et des théories de l’énonciation.
Entre métathéâtre et tragédie. Etude comparative de trois variations sur "le prométhéen" : Prométhée enchaîné d’Eschyle, Prometeo de Rodrigo García et Prometeo equivocado de Miguel Medina Vicario.
Antonio Lara Pozuelo
Ce travail part d’une intuition : la mise en discours théâtral du "mythe de Prométhée" déploie des significations génériques ou effets de généricité (considérés comme instructions pour la production d'un signifié) que l’on peut associer aux formes dramatiques historiques que sont la tragédie et le métathéâtre. Dans les oeuvres étudiées, les concepts interprétatifs du tragique et de la métathéâtralité coexistent et le personnage prométhéen (qu’il apparaisse sous les traits du héros mythique, d’un boxeur ou d’un anti-héros postmoderne) est l’agent qui essaie d'articuler ces significations a priori divergentes afin d’en devenir le lieu d’une synthèse, avec plus ou moins de succès selon les cas. Les oeuvres sont d’abord traitées individuellement en fonction des notions théoriques définies préalablement, puis comparées en fonction des axes de comparaison qui ont surgi au cours de l’analyse individuelle. Dans un premier temps, les significations potentiellement métathéâtrales du Prométhée enchaîné sont mises en exergue, puis la généricité tragique ou métathéâtrale des "réécritures" est étudiée. Enfin, les trois oeuvres sont mises en relation à travers les mécanismes de construction du temps et du sens qu’elles mettent en oeuvre, le prométhéen se définissant comme la capacité "métathéâtrale" de créer les conditions de l’espoir dans un contexte tragique. Les "réécritures" sont comparées en fonction de leur relation à la tragédie d’Eschyle en tant qu’hypotexte et au "genre" de la tragédie en général. En conclusion, en plus du prométhéen, le travail propose les catégories (applicables à d'autres corpus) de corps et conscience de la représentation pour l’analyse du processus de signification théâtral.
De la dorveille à la merveille : L’imaginaire onirique dans les lais féeriques des XIIe et XIIIe siècles.
Corbellari, Alain
A l’origine de ce mémoire, un étonnement : contrairement à la plupart des textes français de la même époque, les lais des XIIe et XIIIe siècles (de Marie de France et des auteurs anonymes) ne comptent pas de rêve, bien qu’on y dorme beaucoup. Pourtant, ils ne semblent pas moins empreints d’un onirisme latent, implicite. L’étude de ce dernier a structuré le mémoire en deux tableaux. Dans une première partie, thématique, l’analyse, tantôt structurale, tantôt linguistique ou énonciative, tend à montrer que dans les lais féeriques le moment privilégié de la rencontre surnaturelle peut être considéré comme une rêverie compensatoire de la part de protagonistes particulièrement malheureux. Ceux-ci, qui souffrent tous d’une injustice ou de quelque frustration, chercheraient ainsi au travers du fantasme ou du rêve éveillé, une source de consolation dans les bras d’un être féerique. La deuxième partie est uniquement consacrée au lai anonyme Désiré qui, dans notre perspective, fait figure d’exception. L’analyse monographique du lai que nous proposons repose sur l’hypothèse forte selon laquelle le passage central du texte ressortirait au registre du rêve, rêve compris ici non plus au sens de rêve éveillé, mais de ‘vrai’ rêve nocturne, même s’il n’est pas donné pour tel. En conclusion, nous éclairons les passages étudiés dans nos deux parties à la lumière de la classification des songes de Macrobe et nous établissons des ponts, en nous méfiant de l’anachronisme, vers cette autre théorie du rêve qu’est la psychanalyse, en confrontant sur la base des lais les deux pensées parentes mais divergentes de Freud et Winnicott. Outre une lecture très personnelle des textes, ce mémoire propose une revalorisation des lais anonymes si souvent – et si injustement – décriés pour leur manque de lisibilité et de cohérence. Notre lecture tire parti de leurs soit-disantes inconséquences les plus dérangeantes par le biais du rêve, dont on sait bien que le contenu manifeste, par essence saugrenu et illogique, résiste à l’entendement.
« Play It Again, René ! Ambivalences parodiques : la délicate négociation entre le Cœur et le corps dans le Livre du Cuer d’Amours espris de René d’Anjou.
Mühlethaler, Jean-Claude
À l’instar de nombreuses oeuvres du Moyen Âge finissant, le Livre du Cuer d’Amours espris de René d’Anjou (1457) se présente comme un texte à caractéristiques formelles hybrides, empruntant aussi bien au réservoir de la personnification allégorique, telle qu’elle fut popularisée par le Roman de la Rose, qu’à celui des romans arthuriens. Une partie récente de la critique a mis en lumière les aspects essentiellement ludiques d’une pareille circulation intertextuelle en plaçant l’emphase de l’analyse sur les indices de la prise de distance parodique de ce texte par rapport aux hypotextes dont il se nourrit. C’est sur ces recherches que le présent travail prend appui, dans sa volonté d’apporter de nouveaux éléments corroborant l’idée d’un dysfonctionnement, dans le Livre du Cuer, des idéaux courtois et chevaleresque. Les séquences étudiées offrent autant d’exemples de jeux parodiques avec des intertextes « sérieux », qu’ils soient biblique, moraliste ou d’inspiration héroïque. L’angle d’approche choisi pour scruter l’attitude parodique est le recours constant du narrateur à la matérialité (aspects corporels, nourriture, argent, etc.) en dissonance avec l’idéalité de la quête courtoise. Enfin, ce travail tente le pari de débusquer, dans l’examen des occurrences parodiques, une constante moins ludique et plus grave. On peut en effet dégager dans le roman les indices d’une séparation inquiétante entre signifiant et signifié, ainsi qu’un mouvement allant de la sauvagerie vers une civilisation excessive, dont le raffinement semble traité par une rhétorique du dégoût malgré le parti pris ludique de la narration. Une telle charge critique, bien que marginale et de caractère éminemment latent dans l’œuvre prise dans son ensemble, serait ainsi le reflet des préoccupations de l’auteur concernant la vie curiale de son époque et l’état de la courtoisie qui apparaissent, du moins à ses contemporains moralistes, comme le règne de la (fausse) semblance et la courtisanerie.
Un roi pour un duc: la figure du roi Arthur dans le manuscrit B.N.F., Fr. 112 (Texte et image).
Mühlethaler, Jean-Claude
Le manuscrit Fr. 112 des fonds français de la Bibliothèque Nationale de France présente la particularité d’avoir comme commanditaire un des bibliophile les plus férus de littérature arthurienne de son temps. Compilation gigantesque, il inclut des romans de chevalerie dont un cycle de la Vulgate. Le propos de cette étude est d’analyser les rapports que le programme iconographique entretient avec le texte dans les miniatures du Lancelot en prose qui mettent en scène le roi Arthur. La recherche débouche tout naturellement sur la question de savoir quelle était l’idée que le commanditaire du manuscrit, Jacques d’Armagnac, duc de Nemours et comte de la Marche, se faisait de la figure royale. En effet, ce bibliophile, serviteur du roi pendant la reconquête du royaume, fut aussi membre de la Ligue du Bien Public et intrigua contre Louis XI. La figure du roi Arthur, dans le programme iconographique du manuscrit 112, reflète-t-elle les orientations politiques de son noble commanditaire ?… Exprime-t-elle — face à la conception de la royauté au XVe siècle — une nostalgie de la société chevaleresque, telle que la décrit le roman de Lancelot deux siècles auparavant ?…
Corps toujours. Autour du corps dans la Trilogie de Samuel Beckett.
Kaempfer, Jean
Depuis une quarantaine d’années, les critiques s’efforcent, avec plus ou moins de succès, d’expliquer la Trilogie de Samuel Beckett. Chacun s’y emploie à sa façon, mais elle est de ces œuvres qu’on ne sait jamais trop par quel bout saisir. Ce travail s’attache à démontrer que, dans ce vaste effort explicatif, le corps n’a pas été suffisamment considéré. En effet, si l’on a constaté la décomposition physique de ses personnages principaux, on a fort peu tenté de l’expliquer. On a relevé aussi une tendance à considérer son corps comme un objet. Curieux ? Pas selon ce travail. Réduire leur anatomie, en émousser les sens, est l’unique solution trouvée par les personnages pour surmonter la difficile relation qu’ils mènent avec leur corps. Nous y abordons donc les divers points concernant cette hypothèse. Sont également traitées la fréquente assimilation du corps au monde des objets et les tentatives de le vivre de manière naturelle.
L’engagement dans le néo-polar : défense et illustration de la langue "noire" : Jean-Bernard Pouy.
Meizoz, Jérôme
La littérature engagée remet en question la définition d’une littérature atemporelle et détachée des contingences historiques. Tel est aussi le cas du roman noir, genre romanesque à part entière né aux Etats-Unis dans les années 1920-30 et peu à peu rebaptisé « polar » par le public français d’après-guerre. Dès les années soixante-dix, des auteurs comme Manchette, Daeninckx, Pouy ou Fajardie, réunis sous l’étiquette de « néo-polar », se révèlent des auteurs-trices attentifs à la misère sociale, animés d’une humeur anti-institutionnelle et dénonçant les collusions de la politique avec toutes les formes de pouvoir. Or l'engagement de ces écrivain-e-s est double, confondant l’engagement politique dans les romans avec l’engagement que réclame le roman noir, genre minorisé au sein du champ littéraire. Le genre partage en quelque sorte le même sort que les exclus de la société dont a coutume de parler le polar : littérature en marge, le roman noir écrit sur les marges. Mêlant son engagement à l'extrême gauche à son rejet de la « littérature blanche », Jean-Bernard Pouy développe une posture d'écrivain « populaire » illégitimé et rebelle lui permettant de convertir en valeur positive la position dominée qu’il occupe dans le champ littéraire.
Sur les traces de l’enquêteur. Portrait-robot du héros de roman policier chez Gaston Leroux, Raymond Chandler et Georges Simenon.
Kaempfer, Jean
Le roman policier se distingue des autres genres littéraires par la marque de son personnage principal, l’enquêteur. C’est ce personnage qui est au cœur du mémoire. Pour commencer, je mettrai en lumière quelques uns des principaux invariants du genre, en particulier ceux qui déterminent la figure de l’enquêteur dans le corpus de référence. Je me pencherai ensuite sur la problématique des sous-genres en compagnie de trois auteurs : Gaston Leroux (roman à énigme), Raymond Chandler (roman noir), Georges Simenon (roman policier psychologique). Ainsi, j’aborderai trois types d’enquêteurs : Rouletabille, le journaliste-enquêteur, Marlowe, le détective privé et Maigret, le commissaire de police. Cet angle ouvrira la perspective sur le caractère évolutif du genre en tant que tel d’une part, et d’autre part du personnage, dans ses similitudes comme dans ses différences. Ma démarche d’analyse repose sur trois grilles de lecture qui constituent les critères de recherche retenus. Il s’agira d’évaluer la construction de la figure de l’enquêteur par rapport à la nature de l’énigme, aux méthodes d’investigation et aux autres personnages. En conclusion, je dresserai le bilan des éventuelles constantes ou des éléments différenciateurs du personnage, selon qu’il s’inscrit dans tel ou tel sous-genre.
En tant qu’héritier de Diderot et de Rousseau, Sade fait de la renaissance philosophique de l’individu une apologie de la débauche, de la cruauté et de la satisfaction systématique de tous les vices, projetant de ce fait, à travers ses écrits, les fantasmes de l’homme à un niveau extrême. La barbarie étant tapie en chacun de nous, il s’agit d’explorer l’âme humaine et de nous la faire ressentir. Cependant, bouc émissaire d’une noblesse qui dissimulait hypocritement sa décadence, puis rejeté par les révolutionnaires puritains et versatiles et enfin par le Premier Consul et l’Empire, Sade n’a jamais cessé d’être un paria. Il sera condamné à passer près de la moitié de sa vie en prison. Néanmoins, depuis sa réhabilitation par les surréalistes, l’image diabolique du marquis, s’est bien adoucie, et plutôt qu’il ne répulse, le personnage apparaît désormais comme un homme brisé par des années d’emprisonnement qui affirme sa philosophie pessimiste jusqu’au bout. C’est donc à travers l’univers de la claustration, incluant silence et solitude absolues, que Sade est parvenu à pénétrer les perversions secrètes de l’âme et ses tourments tortueux, en cette manière habile qu’il a de recourir à l’excès pour l’ériger en principe. Sade espérait ainsi pouvoir trouver un état de réconciliation entre la liberté des mœurs et les nécessités de la nature physique et sociale.
Etre et ne pas être un double-rate, ou le paradoxe d’Alexande Jardin.
Cordonier, Noël
Alexandre Jardin est l’héritier d’un clan fabuleux, qui a sensiblement marqué son écriture et sa personne. Deux de ses écrits sont des récits de témoignage, sorte de biographies consacrées à la famille Jardin. En outre, certains de ses romans s’inscrivent dans un genre qui se situe à mi-chemin entre roman et autobiographie : l’autofiction. Dès lors, la question de l’identité est plus que présente dans l’œuvre d’Alexandre Jardin. et l’auteur semble être précisément en quête de son identité Jardin, c’est-à-dire de ce qui le détermine en tant que Jardin. Or la singularité de l’identité Jardin s’exprime par certains éléments poétiques, présents dans les romans d’ordre autofictionnel, comme la récurrence des personnages de père fantasque, la prégnance des thèmes de l’amour ou de l’enfance, ainsi que par l’omniprésence du romanesque dans l’existence des Jardin – omniprésence qui détermine la conception de la littérature d’Alexandre Jardin et qui se trouve thématisée, tant dans les romans que dans les récits de témoignage.
Les métissages littéraires, linguistiques et culturels dans les romans de Ahmadou Kourouma.
Reichler, Claude
En consonance directe avec la situation de l’Afrique d’après les Indépendances, l’œuvre de l’écrivain ivoirien Ahmadou Kourouma met à jour des perspectives littéraires totalement nouvelles pour l’époque. Par l’emploi de divers registres linguistiques, de structures narratives prenant leur source dans différentes traditions littéraires (la littérature orale africaine et la littérature française), ainsi que par la mise en place de divers dispositifs de médiation de la parole, l’auteur élabore un langage nouveau, découlant du mélange des genres et des imaginaires en présence. Située à la croisée de deux langues, le malinké et le français, et par conséquent de deux cultures, l’œuvre de Kourouma reflète de manière remarquable la position ambiguë de l’écrivain africain francophone placé entre deux imaginaires culturels. Le malinké, sa langue maternelle, et le français, la langue coloniale et la seule dans laquelle il ait été instruit au sein du système scolaire, sont les deux pôles entre lesquels sa pensée oscille constamment. Notre étude se situe au cœur de cette rencontre culturelle et linguistique, puisqu’elle cherche à mettre en lumière le résultat identitaire de cette confrontation à plusieurs niveaux. Dans la perspective de mettre à jour les procédés narratifs, linguistiques et énonciatifs des œuvres de Kourouma tout en conservant pour angle d’approche celui du métissage, cette analyse tente de parvenir à la définition de l’identité culturelle qui transparaît dans les textes de l’auteur ivoirien. De fait, le profil du concept identitaire est le point convergent de tous les précédents et la synthèse de ce « tissage » de genres, de voix et d’univers symboliques multiples. Ce mémoire tend alors vers une définition des diverses facettes de cette identité nouvelle née du syncrétisme de l’Afrique et l’Occident, du malinké et le français, et de la tradition à l’encontre de la modernité. Aux croisées d’univers symboliques hétérogènes, aux confins d’une histoire douloureuse dont les séquelles se font par moments encore largement ressentir, l’œuvre de l’écrivain ivoirien Ahmadou Kourouma se fait l’écho d’un monde métissé par les brassages des cultures et la rencontre de deux civilisations. Peut-on alors parler, et c’est là l’aboutissement de notre recherche, de la naissance d’une poétique propre à cet univers hybride ?
Ecrire ou Mourir : la poésie mélancolique à l’aube de la modernité entre l’Allemagne et la France.
Kaempfer, Jean et Hart Nibbrig, Ch.
À travers l’analyse de poèmes allemands et français de 1790 à 1870, ce mémoire tente de dégager les contours de la bile noire au-delà des frontières de la langue. Après une première partie historique visant à définir la mélancolie de l’Antiquité à la modernité, l’analyse se poursuit au cœur de poèmes issus de l’œuvre de Tieck, Lenau, Heine, Gautier, Baudelaire et Verlaine qui incarnent, à leur façon, le déclin de l’idéal romantique. Les textes abordés s’avèrent d’autant plus éloquents qu’ils traitent d'un mal de l’être que nulle science n’a su rendre obsolète aujourd’hui encore. Ce travail aspire ainsi non seulement à pénétrer la mélancolie d’une époque et d’auteurs spécifiques, mais encore à saisir les tenants et aboutissants de cette muse au charme fatal.
« Je ne peux vivre ni sans toi, ni avec toi » : Les figures féminines dans Moravagine et Dan Yack de Blaise Cendrars.
Cossy, Valérie et Le Quellec Cottier, Christine
Ce travail considère les figures féminines des romans dans leur rapport au(x) héros, et constitue une première approche du corpus romanesque cendrarsien avec une perspective de genre. Construites en figures d’altérité pour le(s) héros, c’est la féminité même de ces personnages qui est problématique. Elles représentent autant d’incarnations du principe féminin dans l’univers du héros, et autant de formes de la part du féminin interne au héros lui-même. L’aspiration à l’androgynie et l’exploration du motif androgyne vont constituer une réponse cendrarsienne à l’impasse de la différentiation sexuelle.
Ce mémoire est consacré à l’auteur suisse cosmopolite : Charles-Albert Cingria (1883-1954). Il insiste sur les tours et les détours empruntés par son écriture. L’auteur utilise la digression comme dynamique principale d’écriture. Ce phénomène discursif sert la ligne ondoyante de ses textes et permet les déviations opérées par l’écrivain. Celui-ci détourne constamment ses propos, et par divers procédés détourne l’attention du lecteur. Il peut être défini comme un animateur qui distrait son public et détourne son attention. Cingria offre au lecteur le spectacle d’une langue foisonnante, tournoyante, que l’on qualifiera ici de gravitationnelle. Notre travail se propose de déjouer les ruses de l’auteur en démontrant que sous l’apparente spontanéité de son langage se trouve l’habileté, voire la virtuosité d’une écriture souveraine aux maladresses feintes.