Singularité plurielle d’un personnage de roman : la désignation d’Odette de Crécy dans A la Recherche du Temps perdu de Marcel Proust.
Zufferey, Joël
Le personnage d’Odette de Crécy traverse À la Recherche du Temps perdu en révélant progressivement des traits de natures si opposées qu’ils en viennent à menacer son intégrité. De même que de la tasse de thé du narrateur surgissent la Vivonne, ses nymphéas, Combray et tous ses habitants, le personnage d’Odette s’étire et se déplie en une éclosion qui révèle des êtres aussi variés que Miss Sacripant, « la dame en rose », Mme Swann ou encore Mme de Forcheville. Cet étrange morcellement a été étudié par de nombreux auteurs qui l’ont généralement lié à l’instabilité onomastique du personnage d’Odette. Un certain nombre d’indices suggèrent cependant que ce phénomène ne peut être expliqué intégralement par la variabilité des noms propres de ce personnage. Nous présentons dans ce travail une analyse de la désignation d’Odette qui montre que l’instabilité onomastique n’est de loin pas le seul phénomène à être mobilisé par les forces qui tendent à défaire et à pluraliser ce personnage singulier. Pour ce faire, nous avons réalisé un inventaire de l’ensemble des désignateurs d’Odette et l’avons soumis à une analyse reposant sur deux axes, le premier visant à déterminer la nature et le rôle joué par les éléments participant à la pluralisation d’Odette, le second visant à déterminer la nature de ce qui, au contraire, permet d’assurer et de maintenir la cohésion de ce personnage exemplaire de la pluralisation qui s’exerce sur un grand nombre de personnages de la Recherche.
La langue ramuzienne dans tous ses états : recherche d’un « centre de gravité » esthétique et philosophique de la langue chez Ramuz.
Cordonier, Noël
Contrairement à l’idée communément admise, la langue ramuzienne n’est pas seulement un moyen d’expression qui décrirait la beauté du monde paysan. Elle peut se mettre dans tous ses états – au sens propre du terme. Grâce au dynamisme du geste, la langue ramuzienne déchire l’ordre social, froisse ses personnages, emmêle les référents, détruit la temporalité. Ce pessimisme linguistique correspond bien au climat tendu du début du XXe siècle. Sa langue romande, plus encore qu’une construction (destructrice), permet de décrire un monde en train de sombrer dans les affres de la guerre… Ce travail est un cheminement vers la découverte du « centre de gravité » philosophique et esthétique de la langue ramuzienne : l’idée de destruction totale1. Au fil des trois sections du travail, nous n’allons pas seulement étudier une langue dans tous ses états, mais aussi différents états (et malheureusement pas tous les états) d’une langue. Que pensait Ramuz de son style ? Les métaphores de Ramuz-Peintre ou encore de Ramuz-Poète sont-elles pertinentes ? Faut-il organiser son œuvre selon le modèle traditionnel divisé en trois périodes ou par l’usage de tendances ? Ce parcours nous mènera de la langue qui parle de la langue à une étude frontale de la langue en action, dans tout ce qu’elle possède d’original.
L’Histoire du Chevalier Des Grieux et de Manon Lescaut est, Faust mis à part, l’œuvre moderne ayant suscité le plus grand nombre d’adaptations destinées à la scène lyrique : nous avons recensé sept « relectures » dont cinq nous sont parvenues : Manon Lescaut or the Maid of Artois de Balfe (1836), Manon Lescaut d’Auber (1856), Manon de Massenet (1884), Manon Lescaut de Puccini (1893) et Boulevard Solitude de Henze (1952). Paradoxalement l’adaptation scénique du roman de Prévost s’avère des plus problématique. Les librettistes seront contraints, ainsi que l’exige le « genre littéraire » du livret d’opéra, de synthétiser l’action en un minimum de scènes, dans la plupart des cas d’édulcorer le sujet du roman - longtemps jugé immoral - et par conséquent déplacé sur une scène lyrique, et, surtout, de donner corps et âme au personnage énigmatique de Manon. Dans ce travail, nous nous proposons donc de comprendre comment ces cinq adaptations s’approprient le mythe de Manon, selon des codes propres à leur époque, étant entendu que lorsqu’un artiste s’inspire d’un chef-d’œuvre du passé, il ne s’agit pas seulement pour lui d’illustrer un sujet connu, mais aussi d’exprimer sa propre vision du monde et celle de ses contemporains.
Shan Sa : de la francophonie à la « littérature-monde ».
Cordonier, Noël
L’objet du présent mémoire est Shan Sa, auteure chinoise émigrée en France. Son cas est étudié selon deux axes : - Le premier insère l’auteure au sein de la problématique de la francophonie, à la fois comme organisation (l’O.I.F., ou Organisation internationale de la Francophonie) et comme simple aire culturelle et géographique qui englobe les écrivains qui ont choisi de s’exprimer en français. D’une part, s’appuyant sur un récent manifeste paru dans Le Monde, l’auteure de ce travail explique comment la Francophonie est aujourd’hui accusée de n’avoir pas su changer avec son époque et de défendre des idées héritées du colonialisme, et aussi comment l’organisation s’en défend. D’autre part, l’ouvrage de Dominique Combe, Poétiques francophones, qui a étudié en profondeur les écrivains francophones, est examiné. La question est en effet de savoir s’il est un bon outil, aujourd’hui, pour tenter de décrire une auteure comme Shan Sa. - Le second axe étudie spécifiquement l’œuvre de Shan Sa, tout en tentant d’expliquer son succès. Si, en effet, l’écrivaine fait partie d’une famille nouvelle d’écrivains immigrés, il faut définir quelles sont ses particularités. Constituant le volet plus « monographique » du travail (à ce jour, l’auteure de ce mémoire ne connaît pas d’autre étude universitaire sur Shan Sa), cet axe a pour but d’ouvrir le plus de pistes de réflexion possibles sur l’écrivaine, et d’élaborer quelques lois propres à son œuvre. Ainsi, une étude poétique, mais aussi du lectorat, permet de poser les jalons de toute étude postérieure à ce mémoire. Enfin, le lien est fait entre les deux axes principaux du mémoire, à savoir le manifeste et les Poétiques francophones d'une part, et Shan Sa, d’autre part, répondant à la question : quel type d’écrivaine Shan Sa est-elle, insérée dans la problématique de la francophonie ?
Tristan et Isolde du XIIIème au XXIème siècle : une analyse de l’histoire chez Gottfried de Strassburg, Richard Wagner et Olivier Py ; Tristan und Isolde : une méditation sur le temps.
Chaperon, Danielle
Ce travail propose une analyse comparative de Tristan et Isolde chez Gottfried de Strassburg, dans l'opéra de Richard Wagner et à travers la mise en scène de cette œuvre par Olivier Py, ainsi qu'une interprétation de la mise en scène de Py. En mettant en évidence la question de la temporalité, cette étude développe principalement les rapports entre le temps et l'amour à l'intérieur de chacune des versions de l'histoire et examine la problématique de la pérennité du mythe de l'amour lié à la mort.
Écrire la vie de Marie Bashkirtseff. Journal personnel et biographies.
Rosset, François
Ce mémoire a pour sujet Marie Bashkirtseff (1858-1884), jeune fille russe, auteur d’un journal intime de 19000 pages écrit en français, qui est l’un des premiers journaux “d’inconnu” a avoir été publié en France (1887). Sujet d’une vive controverse biographique, elle a été la victime d’une “légende“ qui n’a pas cessé de circuler à son sujet ; son journal a été élagué, déformé, de manière à la faire entrer dans un moule — Marie, jeune fille romantique, jeune fille modèle. Récemment, d’autres biographes et d’autres éditeurs se sont intéressés à son œuvre, pour tenter d’invalider la “légende”. Ce travail examine les discours biographiques produits sur Marie Bashkirtseff au cours du vingtième siècle, à travers l’histoire des diverses éditions du journal, et des biographies de la diariste. Ce “rétablissement de la vérité” n’est-il pas, finalement, qu’une nouvelle légende ?
La scripta ajoulote dans la seconde partie du XIIIe siècle.
Zufferey, François
Le Jura parle français ! Il le parle d’ailleurs si bien et depuis si longtemps que son patois est le seul du pays qui soit d’ascendance oïlique. Vous faut-il un argument supplémentaire ? Eh bien, sachez que c’est sur son territoire qu’a été rédigé le plus ancien document en langue vulgaire de Suisse romande. Cette charte, datée du mois d’avril 1244, ainsi que les six autres actes en ancien français issus de la même région et antérieurs au XIVe siècle, ont servi de base à l’étude philologique que constitue ce mémoire. Le corpus réuni, bien qu’un peu maigre pour tirer des conclusions définitives sur la langue quotidienne des Jurassiens à la fin du moyen âge, permet néanmoins d’en percevoir les principales tendances évolutives. Et croyez-moi ou non, la scripta locale, sous ses dehors très français, semble bien trahir un lien de parenté linguistique entre Jurassiens et autres Romands plus étroit qu’on ne l’aurait imaginé…
A chaque genre suffit son œuvre : approche de la généricité chez François Bon par une lecture de l’usine.
Kaempfer, Jean
Si le travail de François Bon s’attache à faire mémoire des marges de notre époque (usines, SDF, banlieues, chômage, etc.), limiter l’apport de cet auteur à cette seule fonction référentielle serait en omettre une dimension fondamentale. En effet, par un travail constant sur la forme, François Bon œuvre à modifier la posture du lecteur face au texte, proposant une lecture du monde à chaque fois inédite. Au travers d’une lecture de l’usine, ce travail tente de donner sens à un parcours apparemment chaotique, oscillant entre roman, récit, essai, témoignage. Les trois livres qui constituent le corpus de ce travail constituent à cet égard un échantillon représentatif. Si en 1982, Sortie d’usine paraissait avec la mention roman sur sa couverture, Temps machine, en 1993, ne comportait aucune indication. Pourtant l’auteur a effectué en 2006 un retour au roman avec Daewoo. Il s’agit ici de voir en quoi le message du texte rejoint celui colporté par l’appartenance générique, et comment François Bon s’attache dans chacun de ses livres à déjouer les attentes du lecteur, l’entraînant parfois malgré lui dans des dimensions que la fin du réalisme avait presque rendues impensables.
Le Banquet schmittien : étude sur les figures de l’amour dans le théatre d’Eric-Emmanuel Schmitt.
Chaperon, Danielle
C’est essentiellement l’œuvre dramatique d’Éric-Emmanuel Schmitt qui fait l’objet de ce mémoire, dont la première partie est consacrée à la présentation d’ensemble de ce romancier et dramaturge à succès, paradoxal et inspiré, louvoyant entre tradition et subversion autour de quelques grands mythes littéraires. La seconde partie répertorie et analyse les constantes de sa dramaturgie. Elle révèle ce que l’on pourrait paradoxalement qualifier de dramaturgie socratique et de dramaturgie de la séduction. La troisième partie développe plus à fond ce que suggère le titre, autour des deux axes de son théâtre, l’un métaphysique (existe-t-il une transcendance ?), l’autre plus proche de Platon, sur la nature et le caractère de l’amour (Eros), et de leur articulation : don-juanisme, romantisme, conjugalité, folle passion sont passés au crible très critique d’une suite de pièces, analysées ici selon cette même typologie. Le mémoire aboutit à une conclusion sur « l’amour selon E-E Schmitt », « fréquentation assidue d’un mystère », aboutissement sans dogmatisme d’un parcours initiatique très socratique.
Expérience sensible de l’errance et interaction du sujet avec le monde dans la poésie de José-Flore Tappy.
Maggetti, Daniele
Depuis le Romantisme, les poètes romands ont choisi la question du paysage pour dire leurs expériences du monde, de l’autre et du langage, à tel point que l’on a pu penser que la poésie romande ne se définissait qu’à travers son attachement à ce genre d’évocation lyrique. Aujourd’hui, les poètes romands engagent encore le paysage comme médiation de soi et de la parole. Cette permanence des paysages dans la poésie romande contemporaine suscite des questions. Comment innover dans une pratique déjà traversée par des siècles de poésie ? Ce mémoire prétend démontrer qu’au-delà de la tradition, les poètes romands dévoilent des démarches singulières qui renouvellent le lyrisme moderne. Pour ce faire, nous avons choisi d’étudier les œuvres de la poétesse lausannoise José-Flore Tappy (Errer mortelle (1983), Pierre à feu (1987), Terre battue (1995), Lunaires (2001) et Hangars (2006)). Son univers poétique se déploie à travers une relation dramatique entre l’errante, le monde et le langage, mise en scène par des paysages élémentaires. Cette étude propose d’étudier l’expérience sensible de l’errance et l’interaction du sujet avec le monde, en éclairant les fondements affectifs et les tensions au cœur du lyrisme de Tappy.
« Je vient par lat prézante... » : analyse textuelle d’un cahier (1928) de Jules Doudin.
Adam, Jean-Michel
Centré sur un « écrit brut », ce travail porte sur le bouleversement que subit la langue dans un cahier daté de 1928, écrit par Jules Doudin (1884-1946), interné à l’asile psychiatrique de Cery pour troubles mentaux à caractères psychotiques durant trente-cinq ans. Le premier objectif de ce travail était de faire passer un manuscrit difficile d’accès au statut de texte dactylographié aisément reproductible et analysable numériquement (Lexico 3). Conservé jusque-là dans les archives de la Collection de l’Art Brut de Lausanne, le cahier de 1928 trouve avec le présent travail une nouvelle existence et devient l’objet d’une première analyse. Dans une perspective d’analyse du discours et d’une problématique de mixité des genres, entre l’épistolaire et le journal intime, les textes du cahier sont étudiés sous différents angles : leur usage très particulier de l’orthographe du français, les restes d’un plan de texte épistolaire pour une première partie, ceux des actes de discours et de l’énonciation pour une seconde. C’est notamment à travers l’acte illocutoire de la demande d’un paquet qui revient dans le texte de manière obsessionnelle que nous percevons chez Doudin une volonté de faire (ré)agir le(s) potentiel(s) destinataire(s) de ses lettres et une écriture qui prend la forme d’un recueil composé, dans une entreprise de maintien en exercice de la langue.
Maurice Blanchot : autonomie et responsabilité (1944-1948).
Meizoz, Jérôme
En conjuguant les méthodes de l’histoire littéraire, de la théorie des champs et de l’analyse littéraire, ce mémoire se propose d’étudier l’élaboration de la « posture » de Maurice Blanchot dans l’immédiat après-guerre (1944-1948). Le passé de Blanchot, marqué par des positions politiques d’extrême droite dans les années 30, et dans une certaine mesure encore sous l’Occupation, le conduit à un repositionnement conséquent dans le champ littéraire de la Libération marqué par l’Epuration des écrivains collaborateurs. Ce repositionnement se traduit par l’élaboration de la « posture » de l’écrivain en retrait, qui se présente comme la manifestation d’une autonomie littéraire radicale. Toutefois, cette posture du retrait demeure une forme de participation au champ littéraire et Blanchot, malgré sa volonté d’une parfaite autonomie de son œuvre vis-à-vis des impératifs économiques ou idéologiques du temps, n’en est pas moins amené à réélaborer ses postulats critiques de même que sa production littéraire proprement dite (Le Très-Haut, L’Arrêt de mort), en interaction avec les nouvelles forces dominantes à la Libération. Il est notamment conduit à se positionner vis-à-vis de la nouvelle avant-garde qui a émergé de la Résistance, dominée par Sartre et ses Temps Modernes, qui promeut un nouveau modèle, celui de l’écrivain engagé.
Notre mémoire s’ouvre par un inventaire des marques d’oralité dans les romans malaussèniens de Daniel Pennac, qui nous permet de constater l’inscription de cet auteur dans la filiation de l’histoire littéraire du style oralisé. Cependant, bien qu’il recoure aux procédés déjà utilisés par Céline, Ramuz et Queneau, sa poétique est particulière par l’emploi qu’il en fait. Son œuvre romanesque prône l’importance prépondérante de l’intrigue et de la langue. Nous avons ensuite étudié les influences possibles de trois genres : le conte, la saga et « la leçon de français » sur les écrits de cet auteur. Le travail d’analyse a abouti à la mise en évidence de la spécificité du contrat de lecture de Pennac et a permis d’avancer l’hypothèse que cet accord entre l’auteur et le lecteur comporte certaines similitudes avec celui de l’enseignant et ses élèves. Selon nous, Daniel Pennac serait alors une figure type de l’enseignant-écrivain soucieux de favoriser l’accessibilité de la littérature aux élèves, même les plus réfractaires à cet art.
Les implicites iconiques dans le discours publicitaire.
Lugrin, Gilles
Aujourd’hui, pour se démarquer des annonces concurrentes, les publicitaires doivent chercher à créer un univers particulier autour de leur marque, quitte à s’éloigner de l’objet premier. De ce fait, la publicité joue désormais avec son public. Le considérant comme un partenaire actif, de nombreuses annonces actuelles lui transmettent leur message de manière voilée grâce à l’utilisation d’implicites, aussi bien au niveau textuel qu’iconique. Partant d’une théorie linguistique des implicites textuels, nous allons tenter, grâce aux outils sémiotiques mis en œuvre par Charles Sanders Peirce, de dégager le fonctionnement des procédés implicites iconiques. Dans un double cadre épistémologique (théorie de l’implicite et types de signes), notre hypothèse est que, dans le domaine des images publicitaires, les trois types de signes peircien que sont l’icone, l’indice et le symbole, correspondent successivement aux notions d’explicite, de présupposé et de sous-entendu. Si cela se confirmait, une théorie de l’analyse de l’image pourrait naître du lien entre sémiotique et théorie de l’implicite.
Ce travail propose une réflexion approfondie sur la question de l’érotisme chez Corinna Bille, au travers de l’analyse de cinq recueils de nouvelles et petites histoires. Si Jacques Chessex qualifie de candide la dimension érotique qui colore les textes de l’auteure valaisanne, je pense au contraire qu’elle représente un axe essentiel de son travail de création littéraire. La première partie, Cartographie d’un imaginaire érotique, sera consacrée à l’analyse thématique des espaces d’Eros, géographiques ou imaginaires, liés à la problématique de l’érotisme, que l’introduction de cet essai présente. La seconde partie, plus brève et plus théorique, développera l’hypothèse de Stéphane Zagdanski, qui définit l’écriture comme un acte érotique. J’interrogerai le lien étroit qui existe entre érotisme et écriture, un lien qui permet de penser l’érotisme au-delà du niveau thématique, et de l’envisager comme une fonction poétique.
Chat de Schrödinger et tutti quanta : la physique quantique en littérature.
Kaempfer, Jean et Attalah, Marc
La physique quantique occupe une place prépondérante dans les sciences d’aujourd'hui. Pourtant, sa description de certains phénomènes microscopiques ne correspond pas à notre manière d'appréhender le monde. Influence de l’observateur sur l’objet examiné, indétermination fondamentale ou superposition de plusieurs états différents... Ces concepts ont retenu l'attention de certains écrivains, qui les ont intégrés dans leurs œuvres. Qu’en ont-ils retiré ? Comment ont-ils mis cette discipline hors-normes au service de leurs créations ? Ce travail se propose d’étudier les emplois de la physique quantique dans des textes de fiction narrative, soulignant le rôle de vecteur de connaissances joué par la littérature.
Derrière la personnalité hyper médiatisée de Serge Gainsbourg se trouve un artiste touche-à-tout qui produit plus d’une cinquantaine d’albums, écrit cinq cent cinquante chansons, réalise quatre longs-métrages et six courts, endosse différents rôles dans une trentaine de films, et signe un roman. Le présent travail étudie la « posture d’auteur » de Serge Gainsbourg en analysant les divers personnages qu’il se construit au fil du temps : « Lucien Ginzburg » le peintre renoncé, « Gainsbourg » le chanteur reconnu, et « Gainsbarre », l’artiste vulgaire et incompris. Cette étude tente de prouver que le rôle endossé par l’auteur fait partie, de façon consciente, de son esthétique ambivalente, dont le roman Evguénie Sokolov, sorti en 1980, apparaît comme le programme.
Croc-Blanc : observation scientifique de l’animal, ou description métaphorique de l’homme ?
Barilier, Etienne
Croc-Blanc : une œuvre extrêmement touchante où Jack London a su faire passer un message bien plus profond que ce que le lecteur peut penser de prime abord. L’auteur décrit le développement affectif d’un petit loup sauvage, qui fera la connaissance de l’homme et qui, au contact de ce dernier, finira par se domestiquer pleinement. Les descriptions de l’évolution du petit animal illustrent d’une part ce que la science éthologique nous apprend de la vie du loup – London s’est en effet sérieusement renseigné à ce propos –, mais elles correspondent surtout au développement du petit être humain tel que des spécialistes comme Henri Wallon, Donald Woods Winnicott et John Bowlby nous en parlent. Au fond, London a dépeint l’homme sous les traits de l’animal, sans pour autant faire de ce dernier un être humain. Et c’est bien là que réside tout le génie de cet éminent auteur, qui s’est avant tout inspiré de sa propre existence difficile pour donner forme à celle de son héros quadrupède. Une œuvre étonnante, ni complètement justifiable sur le plan scientifique, ni complètement métaphorique sur le plan littéraire ; bref, une œuvre qui décrit scientifiquement l’existence de l’animal tout en dépeignant métaphoriquement la vie de l’homme…