Céder à la colère dans Le Chevalier au Papegau : enjeux d’une passion dans un roman de tradition courtoise.
Mühlethaler, Jean-Claude
La colère est un sujet bien vaste pour avoir l’audace d’en faire le thème principal d’un travail de mémoire, raison pour laquelle ce mémoire se concentre sur trois colères principales dans Le Conte du Papegau, récit arthurien anonyme de la fin du XIVe siècle : celle du chevalier, possédé par cette fureur guerrière qui motive l’homme au combat, celle de la dame, colère capricieuse qui éclaire les dilemmes de la fin’amor et enfin celle du roi (Arthur), colère souveraine qui, à l’image de l’ira Dei, remet sur le droit chemin ceux qui se sont égarés. En ouverture, le travail propose un panorama de la colère, telle qu’elle est perçue dans différentes disciplines, de sorte que l’on découvre l’étendue et les enjeux de cette émotion, de la théologie et de la philosophie antique à la psychologie moderne. Dans la littérature médiévale, l’omniprésence de la colère comme émotion instigatrice des actions n’est pas une particularité du Conte du Papegau. On la rencontre dès le XIIe siècle, notamment dans les œuvres de Chrétien de Troyes dont s’est inspiré l’auteur du Conte du Papegau en les parodiant. La colère, modulée chaque fois différemment, permet de placer sous un éclairage renouvelé les idéaux courtois et chevaleresques, de réfléchir aussi aux implications politiques d’une émotion qu’Arthur, jeune roi à peine couronné, doit apprendre à maîtriser.
S’il est un drôle d’oiseau dans la chanson francophone contemporaine, c’est bel et bêtement bien Thomas Fersen qui, depuis son premier album Le bal des Oiseaux il y a une quinzaine d’années, a su faire sa place en tant qu’auteur compositeur interprète - casquettes auxquelles il adjoint parfois celle d’arrangeur. En effet, son univers, où se côtoient des personnages décalés et tout un bestiaire à en faire pâlir de jalousie Noé, possède cette patte de l’imaginaire bien achalandé, un art de l’ellipse subtil et un sens de la langue, un goût des mots qu’il ne mâche pas remarquables, ainsi qu’un penchant pour la formule légèrement désuète. C’est un auteur particulièrement sensible à la musicalité même du verbe, au rythme interne que possèdent les vers et il n’est guère surprenant qu’il s’attache à mettre ses textes en musique avec finesse. Une analyse de son style particulier, de sa manière délicate de manier les expressions idiomatiques et d’un langage soigneusement imagé permettent de prendre conscience de la forme originale de ses écrits qui une fois mis en musique et dans l’étude qu’il s’agit de mener révèlent toute leur dimension de véritable texte à chanson.
Michaux, une esthétique de la négociation : étude sur le recueil « Qui je fus ».
Rosset, François
Ce Mémoire a pour objet l’analyse de la structure du premier recueil d’Henri Michaux, nommé « Qui je fus », paru en 1927. S’intéresser à la question de la structure dans une œuvre comme celle de Michaux qui n’a cessé de questionner les normes littéraires, offre une perspective riche tant pour l’étude de celle-ci que pour des questions théoriques plus larges. « Qui je fus » interroge en effet les canons littéraires par sa forme, en raison d’une part de sa nature générique multiple, et d’autre part, de la tension apparente entre l’hétérogénéité des dix parties qui compose le texte et la présence d’indices de numérotation à ces parties. L’analyse a consisté dans un premier temps à dégager un parcours de lecture n’obéissant pas à la linéarité du livre et grâce auquel, dans un deuxième temps, a pu être envisagée la question initiale de l’analyse de la structure formelle.
Fred Vargas et le « rompol » : caractéristiques d’une œuvre.
Kaempfer, Jean
La particularité de l’œuvre de Fred Vargas peut se trouver dans différents aspects de son œuvre. Parmi ces aspects, une appropriation personnelle du genre très typé de la littérature policière, qui se débarrasse de la tradition de critique sociale qui y est attachée. La présence de thèmes liés aux mythes et légendes est également un point caractéristique, ainsi que l’utilisation de personnages excentriques dont paroles et pensées forgent l’ensemble du texte. Au niveau structurel, les romans de Vargas sont en apparence plus traditionnels mais se distinguent tout de même par des procédés se retrouvant d’un roman à l’autre ; parmi lesquels un point de départ basé sur une petite anomalie dans la vie quotidienne des personnages, et le rôle important du hasard dans la résolution de l’énigme, au détriment parfois de la puissance de la déduction.
Les tendances contemporaines de la novellisation : deux exemples.
David, Jérôme
La novellisation peut être définie comme l’ensemble des usages scripturaux découlant de la production filmique. Née au début du 20e siècle, ces écrits, prenant souvent la forme de romans, se développent jusqu’à nos jours en revêtant des formes très variées. Dans ce mémoire, l’auteur, après un bref historique de la novellisation, décrit plus précisément les nouvelles tendances qui se font jour, particulièrement dans les pays francophones. Deux illustrations sont proposées sous forme d’analyse de deux romans : Cinéma de Tanguy Viel et La Tentation des Armes à Feu de Patrick Deville. L’auteur suggère, en conclusion, que la novellisation interpelle fortement les rapports de l’image et de l’écrit.
Réécritures entre Moyen Age et Age classique : des Cent Nouvelles nouvelles aux Contes et Nouvelles en vers de La Fontaine.
Mühlethaler, Jean-Claude
Jean de La Fontaine a puisé son inspiration dans de nombreuses œuvres littéraires pour écrire les Contes et Nouvelles en vers. Parmi ses sources, Les Cent Nouvelles nouvelles bourguignonnes, du XVe siècle, occupent une place de choix aux côtés de Boccace. Basé sur la méthode comparative différentielle, ce travail cherche à montrer les particularités de chacune des œuvres, et à mettre en évidence les changements de sens introduits par Jean de La Fontaine par rapport à sa source. Pour ce faire, une première partie est consacrée au péritexte, afin d’établir, en tenant compte des intentions affichées par les auteurs, ce qui est comparable. Ainsi, l’un et l’autre affirment vouloir plaire à leur public et le divertir ; le rire occupe une place importante dans les deux recueils, ce qu’illustrent notamment les nouvelles basées sur le motif de l’arroseur arrosé. La deuxième partie est donc consacrée essentiellement à l’analyse de la 78e des Cent Nouvelles nouvelles et au conte du Mari confesseur, dans lequel La Fontaine réécrit le récit du Moyen Âge. Il en ressort que, même si le divertissement reste chaque fois le principal objectif, certaines nouvelles médiévales cèdent à un certain moralisme, alors que La Fontaine privilégie une forme de critique sociale.
L’amour en politique : Le Champion des Dames de Martin Le Franc.
Mühlethaler, Jean-Claude
Le Champion des Dames de Martin Le Franc, poème allégorique écrit au milieu du XVe siècle pour le duc de Bourgogne, Philippe le Bon est avant tout un poème didactique et moralisant. Une analyse interne de l’œuvre a permis de distinguer diverses expressions de l’amour (organisées de manière hiérarchique, allant de l’universel à l’individuel) et leurs implications dans un bon gouvernement. Ainsi, selon Martin Le Franc, la noblesse se doit de suivre les préceptes de l’amour divin, le Saint Esprit, pour faire régner la paix sur Terre. L’enjeu est d’autant plus important qu’elle se positionne en intermédiaire entre Dieu et l’humanité. Martin Le Franc a dû cependant se forger une autorité pour imposer sa vision moralisante et des conseils didactiques à son prince, autorité que ce mémoire propose également d’analyser.
L’inventivité dans tous ses états, ou le roman sous le signe de l’insolence : vers une étude des marques d’indocilité dans Verre Cassé, African Psycho et Mémoires de porc-épic d’Alain Mabanckou.
Le Quellec Cottier, Christine
« L’inventivité dans tous ses états ou le roman sous le signe de l’insolence ». C’est sous ce titre que nous voulons aborder les œuvres suivantes d’Alain Mabanckou : Verre Cassé, Mémoires de porc-épic et African Psycho. Notre lecture nous a amené à différentes observations qui sont à relier aux notions d’inventivité, d’indocilité ou d’insolence. Celles-ci se manifestent par des signes divers qui font que le roman illustre un décalage. C’est ce que nous souhaitons présenter et décrire dans le travail. Pour cela, notre démarche se base sur deux axes principaux et indissociables : la forme et le contenu. L’analyse de ces deux champs montre en quoi les textes d’A. Mabanckou proposent un registre personnel. L’enjeu principal est donc de définir ce qui fait que les romans choisis expriment une indocilité et comment celle-ci s’exprime. Pour répondre à ses interrogations, nous montrons à travers le premier axe comment le style peut être transgressif et en quoi l’on peut dire qu’il s’éloigne des normes établies. Puis, nous utilisons le deuxième axe qu’est le contenu pour traiter le thème de la marginalité et son illustration par les personnages et les décors. Cette démarche, majoritairement basée sur une analyse textuelle, permet de souligner l’adéquation du contenu et de la forme et les différentes manières d’insérer la ou les indocilités dans le texte. Ces différents éléments soulèvent la question de la dénonciation et de l’engagement de l’auteur au sein de ses récits fictionnels. Peut-on voir l’indocilité et ses modes d’expression comme un outil de la dénonciation ? Voilà une des questions qu’amène la dernière partie du travail. Il est certain qu’Alain Mabanckou est un auteur de la pluralité, de la multitude et son écriture se fait maniable, adaptable et surprenante. C’est ce qui découle de nos bilans de lecture et d’écriture.
Petites frappes sur ruban noir : le néopolar chez Jean-Patrick Manchette, Jean Echenoz et Tanguy Viel.
Kaempfer, Jean
Manchette, Echenoz et Viel réinvestissent le polar, comme genre littéraire et cinématographique, en recyclant ses scénarios convenus et ses personnages stéréotypés. Mais cette incorporation du répertoire hard-boiled est distancée, puisqu'elle se réalise au travers d'un jeu avec les conventions du récit romanesque et avec celles du roman noir.
Les figures de style dans les romans de Boris Vian : le rôle des jeux sur la langue dans la construction de l’univers fictionnel.
Kaempfer, Jean
Ce mémoire est l’occasion de se pencher sur ce qui fait l’ossature d’un texte. Chez Boris Vian, l’usage particulier que cet écrivain fait de la langue est à la base de l’édification, de la mise en place de l’univers fictionnel. En étudiant les figures de style présentes dans les six romans qu’il écrivit sous son vrai nom, nous pouvons dégager trois de leurs fonctions principales : elles sont à la fois créatrices, subversives et contractuelles. En effet, les figures de style sont à l’origine d’une grande partie des éléments spécifiques de l’univers vianesque, elles remettent en cause les structures de la langue et de la société dont elle est issue et enfin elles permettant de faire adhérer le lecteur au texte et d’établir un contrat de lecture entre lui et l’écrivain. Ces divers éléments permettant d’expliquer, en partie, comment Boris Vian est parvenu à construire un univers à la fois étrange et parfaitement cohérent.
Le Manuscrit P2 dans la tradition de la Vie de saint Alexis.
Zufferey, François
Depuis l’édition de Gaston Paris publiée en 1872, le texte critique de la Vie de saint Alexis n’a guère progressé. C’est pour combler cette lacune que le professeur François Zufferey a entrepris un vaste travail de recherche qui débouchera sur une nouvelle édition de ce texte fondamental de la littérature médiévale. L’étude du manuscrit French 6 de la John Rylands University Library de Manchester, siglé P2, s’inscrit dans ce contexte. La recherche vise à apporter des informations sur un manuscrit particulier (constitution codicologique, histoire, aire dialectologique) et à les exploiter pour confirmer un point spécifique du stemma de la tradition de la Vie de saint Alexis. L’enjeu de l’étude est donc directement lié à la future édition du texte hagiographique. Le mémoire propose d’abord une présentation synoptique des versions contenues dans les manuscrits A, L, P2 et P. Le texte du manuscrit P2 a été entièrement collationné, et quelques erreurs contenues dans sa précédente édition ont pu être relevées. Une seconde partie, analytique, est consacrée aux divers aspects du manuscrit. Le travail se termine par l’étude de la place du manuscrit dans l’ensemble de la tradition textuelle de la Vie de saint Alexis. L’appartenance de P2 à une version deux fois remaniée du texte original, l’existence d’une source commune unissant P et P2, et enfin le lien direct entre P2 et une version primitive du texte constituent les points principaux que cette recherche a établis. La démonstration de l’existence de ce lien n'est pas anodine : la nouvelle édition de la Vie de saint Alexis ne pourra plus ignorer cette source trop souvent mise de côté en raison de son caractère lacunaire.
Les personnages et les valeurs d’engagement dans La Condition Humaine et L’Espoir d’André Malraux.
Meizoz, Jérôme
Le présent mémoire a pour objectif principal d’étudier les formes de l’engagement dans les romans d’André Malraux. Pour ce faire, il se base sur un corpus incluant La Condition Humaine (1933) et L’Espoir (1937). Ce mémoire s’organise en deux parties. Un premier chapitre expose l’historique et les modalités de l’engagement littéraire puis la conception de celui-ci chez Malraux. On présente ensuite les fonctions du personnage romanesque, afin d’aborder l’étude des valeurs mises en jeu dans les deux ouvrages du corpus. Vient ensuite l’étude des romans qui permet de mettre en évidence l’axiologie des personnages et les stratégies narratives de Malraux. La discussion porte alors sur la question du « roman à thèse » et de ses actualisations chez l’écrivain français.
Scénarios du Possible / Possibles du Scénario : esthétique d’une tendance générique chez Marguerite Duras.
Kaempfer, Jean
Marguerite Duras – à l’image de plusieurs écrivains qui lui sont contemporains – a écrit et publié une quantité de « scénarios ». Le présent mémoire propose de se pencher, dans une perspective diachronique, sur les textes de l’écrivaine qui participent de ce genre de manière plus ou moins explicite. Il a également pour ambition de cerner les enjeux esthétiques d’ une tendance générique qui se prolonge au-delà de ses propres frontières. L’écriture scénaristique que pratique intensément Marguerite Duras à partir des années soixante n’est pas uniquement un moyen en vue d’une fin cinématographique ; elle sert progressivement de prétexte à une réflexion éthique et esthétique portant sur le rapport entre l’écrit et le filmique. Loin d’être accessoire, cet usage particulier du genre investit le centre de l’écriture durassienne : les traits génériques s’écartent graduellement de leur fonction première et deviennent de véritables traits de style.
Le « pleurer-rire » d’Emmanuel Dongala : modalités énonciatives et représentations du discours dans les romans d’Emmanuel Dongala.
Le Quellec Cottier, Christine
Par désir d’étudier l’œuvre romanesque d’Emmanuel Dongala, nous avons décidé de l’aborder à partir de nos principaux constats de lecture, constats qui touchent à des questions d’énonciation et de représentation des discours. Un fusil dans la main, un poème dans la poche et Le feu des origines sont racontés au mode hétérodiégétique, tandis que les deux plus récents, Les petits garçons naissent aussi des étoiles et Johnny Chien Méchant sont énoncés par des jeunes racontant leur propre histoire. Dans ce travail, nous désirons savoir si la mise en discours modifie la manière dont l’écrivain s’implique à travers sa littérature. Dans notre corpus le discours se retrouve, à divers degrés, en état d’instabilité dans le cours de la narration, ce qui peut être le signe d’une ambiguïté et d’une manière détournée de l’auteur de s’impliquer en utilisant par exemple les procédés de l’humour et de l’ironie. Nous aimerions savoir comment la mise en discours se constitue et se transforme, et aussi si une transformation est signe d’une évolution qui irait d’un élan de combativité défendu dans Un fusil dans la main, un poème dans la poche à une représentation du désenchantement du personnage de Johnny et du monde qu’il symbolise ? Pour répondre à nos interrogations, le travail s’intéresse au discours, c'est-à-dire qu’il va analyser de près les fonctions du ou des narrateurs et la manière dont il s’énonce et énonce ses personnages. Le travail s’intéresse alors aussi aux discours représentés mais également à la relation que le narrateur entretient avec son narrataire. Nous regarderons qu’elles sont les différences entre les deux types de modes et quels en sont les enjeux au sein même de chaque œuvre mais aussi quant à l’esthétique de l’écrivain. Pour cela nous utilisons des outils de linguistique textuelle et de narratologie avant de voir en quoi nos analyses textuelles permettent de mettre en lumière des thèmes tels que l’identité ou la violence, thèmes contemporains mais notamment exploités par le biais d’une ambiguïté au sein du discours.
Essai de définition d'un genre de la presse écrite : les rubriques nécrologiques.
Adam, Jean-Michel
Cette étude porte sur un genre particulier de la presse écrite : les nécrologies. L’examen de cinq quotidiens suisses et français – le 24 Heures, Le Temps, Le Monde, Le Figaro et Libération – récoltés sur une période de un mois, nous a permis de procéder, dans un premier temps, à l’établissement de critères définitoires permettant de classer les nécrologies dans deux catégories distinctes : les « longues », que l’on appelle communément "nécrologies", et les « brèves », que l’on connaît davantage sous l’appellation d’"avis mortuaires". Dans un deuxième temps, nous avons observé quels étaient les traits caractéristiques de ces nécrologies. Pour ce faire, nous avons tout d’abord étudié les éléments paratextuels afin d’observer en quoi ceux-ci peuvent influer sur la rubrique nécrologique elle-même. Ensuite, afin d’établir un cadre d’analyse précis, nous avons appliqué cinq critères de définition d’un genre : le critère pragmatique, le critère énonciatif, le critère sémantique, le critère compositionnel et le critère stylistique (Revaz 2001). Prenant enfin une certaine distance par rapport à celles-ci, nous avons examiné le genre du "souvenir" qui permet, contrairement au genre nécrologique, une écriture plus personnelle et donc également plus émouvante, ce qui n'empêche pas certaines nécrologiques d'être poétiques ou tragiques, comme nous avons également pu l’observer.
Réhabiliter un auteur sulfureux ? : le Marquis de Sade et ses biographes, enjeux d’une relation critique.
Rosset, François
La censure a pendant près de cent cinquante ans surdéterminé la réception des œuvres du marquis de Sade, tout comme elle aura créé à son sujet une forme de consensus : l’auteur tout comme ses écrits auraient en effet façonné la notion de sadisme. On se figure alors un homme qui, pour distraire son corps inactif et son esprit malade, écrivit en prison d’infâmes récits à l’érotisme cruel. La redécouverte des textes proprement dits, initiée dans les années 1900, interrompue par les première et deuxième guerres mondiales, pour être reprise et poursuivie à partir de 1950, aura généré une grande effervescence autours de l’écrivain, devenu une figure littéraire majeure pour de nombreuses avant-gardes. Parallèlement, un certain nombre d’ouvrages critiques, dont des biographies érudites, apparurent. Au final, Sade, d’auteur censuré, figure depuis 1990 aux côtés de Balzac et Flaubert dans la prestigieuse Bibliothèque de La Pléiade. De nouveaux défis liés à la biographie sadienne sont ainsi survenus au cours de ces trente dernières années : comment, dans un tel contexte de réhabilitation des textes, les biographies du marquis de Sade relient-elles la vie et l’œuvre de l’écrivain ? Perpétuent-elles les poncifs créés au XIXe siècle ? Notre choix s’est porté sur quatre biographies dont les auteurs ont tous édité Sade durant la grande aventure que fut la parution de ses textes. Il s’agit de l’ouvrage de Gilbert Lely, Vie du marquis de Sade (1959-1989), du volumineux Sade vivant de Jean-Jacques Pauvert (1985-1989), de la biographie de Maurice Lever, Donatien Alphonse François, marquis de Sade (1991) et du récent travail de Michel Delon, Les vies de Sade (2007).
De la simple exubérance au problème clinique, la folie sur scène se décline sous de multiples formes. Considérée non en tant que thématique, mais comme mécanisme perturbateur, elle révèle une volonté de liberté, un affranchissement des règles, aussi bien pour le dramaturge que pour son personnage. Si cette confusion, ce désordre peut s’immiscer à tous les niveaux (intrigue, espace, temps, parole etc.), elle n’en réserve pas moins, paradoxalement, une organisation et une logique implacables. Les deux « patrons » du théâtre, Dionysos et Apollon, s’en trouvent ainsi satisfaits. De Shakespeare à Thomas Bernhard, il s’agira d’analyser les mutations de cette folie théâtrale, qui semble, au fil des époques, perdre son panache, et se faire plus discrète, mais aussi plus profonde. Les exubérances baroques et les fureurs tragiques se verront ainsi remplacées par une folie beaucoup plus intériorisée, mais qui mène vers une vérité.