A l'âge "où les belles couleurs passent": la figure de la jeune fille dans les romans de C.F. Ramuz
Maggetti, Daniele
La figure de la "jeune fille" est un élément incontournable de l'œuvre romanesque de C.F. Ramuz, et pourtant que ponctuellement examinée par la critique de manière précise et spécifique. Nous nous sommes proposé, dans la présente étude, d'observer ce type de personnage particulier dans les romans de l'écrivain vaudois parus dans la dernière édition de ses Oeuvres complètes, entre 2011 et 2013.
Des fonctions assumées par la "jeune fille" au sein des intrigues, au traitement réservé à cette figure par l'auteur, il s'avère certain au terme de notre parcours que ce personnage occupe une place singulière dans le corps féminin des protagonistes de l'œuvre ramuzienne. Tantôt adjuvante ou opposante aux aspirations d'un héros, tantôt sainte salvatrice pour une communauté, ou encore commère frivole en arrière-plan du récit, la jeune fille est aussi une héroïne au centre de ce dernier, confrontée aux épreuves et aux aléas de l'existence au même titre que son équivalent masculin. Sous le regard quelquefois moqueur, plus volontiers encore attendri du narrateur, elle constitue en outre une exception notable dans la considération, globalement négative, que Ramuz réserve dans son opus aux personnages féminins.
(R)écrire les mythes sous l'oppression. Poétiques croisées de Yannis Ritsos et de Sándor Weöres
Heidmann, Ute
"Le poète grec Yannis Ritsos (1909-1990) et le poète hongrois Sándor Weöres (1913-1989) ont tous les deux (r)écrit les mythes grecs, mais dans des contextes culturels et politiques différents. Leurs (re)configurations des ἀρχαῖα ont été développées face à la censure sous la dictature des colonels dans le cas de Ritsos et sous le régime communiste dans le cas de Weöres. ""A Orphée"" (""Στὸν Ὀρφέα"") composé en grec et ""Orpheus"" écrit en hongrois se distinguent par leur manière de mettre en scène la voix du poète. ""La toison d’or"" (""Τὸ χρυσόμαλλο δέρας"") et ""Medeia"" divergent par leurs formes énonciatives. ""Perséphone"" (""Περσεφόνη"") et ""Eros pleurant Perséphone"" (""Persephonét sirató Eros"") sont deux (re)configurations génériques très distinctes.
A l’aide de la méthode de la « comparaison différentielle » proposée par Ute Heidmann, ce travail cherche à mettre en évidence les singularités de chaque (re)configuration. L’étude des modalités de l’énonciation et de textualisation, de l’inscription générique, des dialogismes intertextuel et interdiscursif révèle les nombreux effets de sens créés par les vieilles histoires d’Orphée, de Médée et de Perséphone. Les voix poétiques finissent par se croiser autour du mythe polyphonique de Tirésias.
La lecture proche du texte et la traduction de travail permettent de montrer par les détails que les deux poètes détournent la censure par les subtilités dissimulées dans la langue. Les particularités de leurs mises en discours s’élèvent face à la voix unique du pouvoir. Dès lors, l’acte d’écriture apparaît comme une forme de résistance pour les deux poètes."
La métaphore: "lieu de l'entre-deux". Des théories contemporaines aux réalisations informatiques
Rodriguez, Antonio
Se distinguant de toute approche substitutive théorisant la métaphore comme un double écart - de langage et d'interprétation - , ce mémoire réfléchit à une modélisation intégrative de la métaphore, des théories contemporaines aux réalisations informatiques.
Il s’ancre alors au sein du débat entretenu entre Ricœur et Derrida, dans le but de poser les points de tension d'une possible théorisation contemporaine de la métaphore, entre microstructures langagières et macrostructures du monde; il propose ensuite une modélisation de la métaphore comme acte intersubjectif global de l’entre-deux, c’est-à-dire comme discours analogique omniprésent articulé entre niveaux sémique, sémantique et mondain, mais aussi entre pensée du sujet, interactions interindividuelles et réseau métaphorique; il questionne finalement, à partir de la modélisation proposée, les modèles de la métaphore computationnelle propre à la génération du discours numérique.
Écrire Street View. Récit de voyage virtuel et photographie numérique dans "Dreamlands" et "Éclats d'Amérique" d'Olivier Hodasava
Caraion, Marta
Depuis 2010, Olivier Hodasava voyage grâce à Google Street View et rend compte quotidiennement de ses aventures virtuelles sur son blog Dreamlands en alliant textes et captures d’écran. Ce dispositif original, l’auteur l’a ensuite décliné dans un livre, Éclats d’Amérique, ouvrage paru en 2014 aux éditions Inculte. Le présent travail s’intéresse dans un premier temps à la façon dont les nouveaux outils de cartographie reconfigurent le genre du récit de voyage pour donner naissance à la catégorie du voyage virtuel. Dans un deuxième temps, l’enjeu est d’interroger la dimension photolittéraire de cette œuvre pour tenter de la situer dans le débat sur la fin de l’indicialité dont le tournant numérique (digital turn) serait responsable. Le dispositif photolittéraire crée un trouble énonciatif dont il s’agit de dégager les particularités. Enfin, il est question des différents modes de publication des œuvres d’Olivier Hodasava et des transformations que subissent l’écriture et la lecture lors du passage du blog au livre et du livre au blog.
Histoire, Genres et Romans : une étude de "Comme le Sable", Alice Rivaz et "La Vie attendait", Yvette Z'Graggen.
Cossy, Valérie
Meizoz, Jérôme
Etude comparative de "Comme le Sable" (1946) d'Alice Rivaz et de "La Vie attendait" (1944) d'Yvette Z'Graggen qui se focalise sur la question des genres durant une période historique forte.
Les princesses aux "talents hauts". La déconstruction des stéréotypes de genre dans les albums de jeunesse contemporains
Wahlen, Barbara
La princesse des contes de fées évoque un idéal de féminité au destin tout tracé. Son histoire se termine inévitablement dans les bras de son sauveur de prince charmant – une fin résumée par la formule « ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants ». Et si les princesses d’aujourd’hui vivaient autrement ?
Ce mémoire observe la déconstruction des stéréotypes de sexe, en regardant comment les princesses modernes des albums de jeunesse se distancient de celles issues des contes (Perrault, Grimm et Andersen). J’analyse quatre œuvres contemporaines : La princesse et le dragon (2005 [1980]) de Robert Munsch et ill. par Michael Martchenko, La princesse Rose-Praline (2010) de Gaël Aymon et ill. par Julien Castanié, La Belle éveillée (2011) du même auteur et ill. par François Bourgeon et Le prince aux petits pois (2016) écrit par la classe de CE 1 lauréate du concours « Lire égaux 2015 » et ill. par Fred L.
Ces quatre albums de jeunesse sont tous publiés par la maison d’édition Talents Hauts, créée en 2005 par Laurence Faron et Mélanie Decourt, dans le but de proposer aux (jeunes) lecteurs et lectrices d’aujourd’hui des choix variés de se réaliser – afin que féminité et masculinité riment avec liberté et individualité. Du fait que mon corpus s’adresse autant aux lecteurs/lectrices adultes qu’enfants, mon étude tiendra compte des effets de lecture et de sens induits par la combinaison du texte (travail de l’auteur(e)) et des images (travail de l’illustrateur(e)) des albums. Comment la princesse s’y retrouve-t-elle actualisée ?
Corinna Bille, fée du logis et de l’écrit : la condition littéraire d’une femme écrivain en Suisse romande entre 1944 et 1963
Maggetti, Daniel
Bien que Corinna Bille soit reconnue aujourd’hui comme une auteure majeure de la littérature suisse romande, les premières années de sa carrière littéraire (1944-1963) sont marquées par un abandon progressif de la forme romanesque au profit de la nouvelle. Sur la base des travaux de Virginia Woolf et de Bernard Lahire, ce mémoire tente de comprendre cette transition en interrogeant les contraintes familiales et financières concrètes qui ont pesé sur le parcours de cette femme écrivain valaisanne.
Les lettres que Corinna Bille a échangées non seulement avec ses proches, mais également avec ses éditeurs et des journalistes, servent de matière première à la documentation des deux parties de ce travail. Chacune se donne pour but de couvrir un pan des besoins que dresse Virginia Woolf pour qu’une femme puisse produire de la littérature : une « chambre à soi » et des revenus en suffisance. Dans « La chambre de Corinna », nous étudions les rapports que l’écrivaine entretient avec sa famille et ses proches, ainsi que sa gestion de la maternité et de ses moments d’écriture. Avec « Le salaire de l’écriture », nous nous penchons ensuite sur la question matérielle en interrogeant ses revenus qui proviennent en grande partie de ce qu’elle fait paraître sous forme de livres ou d’articles dans les journaux. Nous cherchons ainsi à savoir comment Corinna Bille gagne sa vie avec l’écriture et si ses choix génériques ont pu être influencés par des critères financiers. Si la première partie repose plutôt sur des aspects privés de sa vie en se concentrant sur son statut de mère au foyer, la deuxième prend plus largement en compte l’évolution de l’écrivaine dans le champ littéraire romand de l’après-guerre et sa tentative d’y bâtir une carrière littéraire aussi rémunératrice que possible.
Le sacerdoce d’une prostituée - Images et paradoxes de la figure de la courtisane dans « Le noir est une couleur » et « La Passe imaginaire » de Grisélidis Réal
Maggetti, Daniel
Ce mémoire se propose de consacrer une analyse à Grisélidis Réal (1929-2005), figure tutélaire de la prostitution qui, en dépit de l’important succès médiatique qu’elle a suscité, n’a jamais réellement rencontré d’intérêt auprès du monde académique, en particulier dans le domaine littéraire. Le présent travail tente d’explorer cette double facette d’écrivain-courtisane en mettant en lumière les paradoxes élaborés au sein des récits réaliens afin de condamner l’hypocrisie de la société bourgeoise tout en réhabilitant le statut de prostituée. Dans l’optique d’illustrer ces différents aspects, nous retiendrons les ouvrages publiés et assumés du vivant de l’écrivain en nous focalisant sur « Le noir est une couleur » et « La Passe imaginaire » qui reflètent au mieux les représentations littéraires de la courtisane que Grisélidis Réal souhaite véhiculer. Nous analyserons les mécanismes narratifs utilisés afin d’opérer les renversements nécessaires à une remise en question de la doxa, puis nous étudierons le sacerdoce du je narré en relevant tous les éléments religieux, voire hagiographiques, qui participent à la mise en scène du processus de béatification de la courtisane. Enfin, nous tâcherons de proposer une redéfinition de la figure de la prostituée, telle qu’appréhendée par l’écrivain genevoise. Nous dévoilerons ainsi comment Grisélidis Réal opère un véritable renversement de valeurs qui exalte le registre du bas tout en empruntant les voies célestes du modèle religieux, jusqu’à faire rimer prostitution, subversion et rédemption en bâtissant des ponts entre sacrifices humain et chrétien, dans un véritable réseau de constructions symboliques inspirées sur le fond comme sur la forme par la logique religieuse.
« L'Étranger dans le texte » Les premières traductions françaises de Walden
Philippe, Gilles
En dépit de son succès relativement limité en France et dans le monde francophone, Walden, l’œuvre principale de Henry-David Thoreau, a été traduit de nombreuses fois en français (six au total). De nos jours, certains éditeurs évoquent la piètre réputation des premières traductions pour promouvoir les versions plus récentes qu’ils continuent de proposer. Il semble donc intéressant de se pencher sur les toutes premières versions françaises (datant du début du 20e siècle) pour reconstituer, à travers leurs qualités linguistiques intrinsèques, la lecture que les premiers traducteurs ont souhaité proposer à leurs compatriotes, ainsi que la manière dont leurs choix concrets ont pu influencer la réception de Walden par les lecteurs francophones. Cette étude se base sur des observables de nature stylistique tels que les aphorismes, les antithèses, les paradoxes, les proverbes, les idiomes ou encore les omissions, mais aussi sur les calques sémantiques et autres « faux-amis », dans le but de révéler les choix conscients et inconscients des traducteurs et de mettre à jour les mécanismes qui permettent à chaque nouvelle traduction de construire un texte inédit, profondément modelé par le contexte littéraire et l’horizon d’attente de son époque.
Les princesses aux "talents hauts". La déconstruction des stéréotypes de genre dans les albums de jeunesse contemporains
Wahlen, Barbara
La princesse des contes de fées évoque un idéal de féminité au destin tout tracé. Son histoire se termine inévitablement dans les bras de son sauveur de prince charmant – une fin résumée par la formule « ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants ». Et si les princesses d’aujourd’hui vivaient autrement ?
Ce mémoire observe la déconstruction des stéréotypes de sexe, en regardant comment les princesses modernes des albums de jeunesse se distancient de celles issues des contes (Perrault, Grimm et Andersen). J’analyse quatre œuvres contemporaines : La princesse et le dragon (2005 [1980]) de Robert Munsch et ill. par Michael Martchenko, La princesse Rose-Praline (2010) de Gaël Aymon et ill. par Julien Castanié, La Belle éveillée (2011) du même auteur et ill. par François Bourgeon et Le prince aux petits pois (2016) écrit par la classe de CE 1 lauréate du concours « Lire égaux 2015 » et ill. par Fred L.
Ces quatre albums de jeunesse sont tous publiés par la maison d’édition Talents Hauts, créée en 2005 par Laurence Faron et Mélanie Decourt, dans le but de proposer aux (jeunes) lecteurs et lectrices d’aujourd’hui des choix variés de se réaliser – afin que féminité et masculinité riment avec liberté et individualité. Du fait que mon corpus s’adresse autant aux lecteurs/lectrices adultes qu’enfants, mon étude tiendra compte des effets de lecture et de sens induits par la combinaison du texte (travail de l’auteur(e)) et des images (travail de l’illustrateur(e)) des albums. Comment la princesse s’y retrouve-t-elle actualisée ?
Le Comte de Tressan et la redécouverte du Moyen Âge au siècle des Lumières : une étude comparative de "Jehan de Saintré" et de son adaptation dans la "Bibliothèque universelle des romans"
Wahlen, Barbara ; Rosset, François
Le présent travail s’inscrit dans la lignée de plusieurs études récentes dédiées à la redécouverte de la littérature médiévale au XVIIIe siècle et, notamment, à la Bibliothèque universelle des romans (1775-1789). Vaste entreprise éditoriale, ce périodique entend donner l’âme de tous les romans, y compris médiévaux, sous forme d’extraits. Nous exploiterons l’hétérogénéité de Jehan de Saintré (1456), roman composite introduisant son lecteur à une multiplicité de traditions littéraires, dans l’analyse de l’adaptation qu’en donne le comte de Tressan. L’extrait en question, intitulé « Le Petit Jehan de Saintré », paraît dans la Bibliothèque universelle des romans en janvier 1780. Avec cette étude de cas, nous souhaitons contribuer à l’examen de la réception de la littérature médiévale au XVIIIe siècle. En tant qu’adaptateur, Tressan vulgarise en effet une certaine conception du Moyen Âge et de ses productions littéraires.
Quand le mauve donne le ton : formes, représentations et enjeux de la migration dans "Le Ventre de l’Atlantique" (2003), "Kétala" (2006) et "Celles qui attendent" (2010) de Fatou Diome
Le Quellec Cottier, Christine
À la fin des années 1990, une nouvelle génération d’auteurs baptisée « enfants de la postcolonie » émergeait. Intimement liée aux mouvements migratoires, son statut ainsi que son esthétique a notamment été qualifiés par la notion de « l’entre-deux ». Nés après les indépendances, dans un monde cosmopolite et mondialisé, ces auteurs appartiennent à plusieurs espaces géographiques et nourrissent leur écriture des différents univers culturels qu’ils traversent. Fatou Diome, née au Sénégal et immigrée en France, qui se perçoit comme un « être hybride », est rattachée à ce courant. À partir de trois de ses romans, Le Ventre de l’Atlantique (2003), Kétala (2006) et Celles qui attendent (2010), notre réflexion cherche à saisir les formes, représentations et enjeux de la migration. Au moyen d’outils méthodologiques tels que la liberté romanesque, l’éthos cosmopolite et de genre, la polyphonie ou encore l’oralisation de la langue, cette étude prétend dévoiler la capacité de l’auteure à rassembler au sein de l’espace littéraire deux univers de croyance longtemps opposés.
Le pouvoir maternel : entre libération et condamnation mortelle du personnage féminin dans la fiction francophone africaine. Perception du phénomène dans "Les Frasques d’Ébinto" (Amadou Koné), "Femme nue, femme noire" (Calixthe Beyala) et "La dernière Lettre" (Salla Dieng)
Le Quellec Cottier, Christine
À la suite de nombreuses lectures proposées par ma Professeure Christine LeQuellec-Cottier, j’ai pu constater que le sujet de la « maternité » faisait l’objet d’une problématique bien distincte au sein de divers romans, poèmes et contes africains. Ce sujet était également traité sous divers angles analytiques et il m’était difficile de lui en donner une définition parfaite.
J’ai décidé alors de m’intéresser au phénomène de la « maternité » en soi, au sein de mes diverses lectures, et aux effets qu’il pouvait procurer aux femmes et aux mères plus particulièrement. Je me suis rendue compte que ce phénomène, compris sous différents aspects, permettait à la gent féminine d’accéder à une certaine autonomie. (La « maternité » leur confère une sorte de puissance intérieure, ineffable, qui se traduit par une plus grande confiance en soi par exemple et qui les motive à se libérer d’un état de soumission à l’homme.) Je voulais donc, dans un premier temps, me pencher longuement sur ce « mystère » existant autour du « fait maternel » afin de comprendre de quelles manières ce dernier procure un pouvoir intérieur aux femmes. Afin de compléter mon propos, j’ai également fait état d’un dénouement récurrent et peu heureux lors de mes lectures. En effet, arrivées à un certain point d’autonomisation, les mères et plus généralement les femmes sont pour la plupart assassinées. J’avais le sentiment que tout était lié et qu’il fallait que je me penche sur ces deux faits, « maternité » et mortalité, afin d’en déduire un principe de cause à effet.
Au-delà de la neuvième forme : étude d’une réception participative autour de La Horde du Contrevent d’Alain Damasio
Turin, Gaspard
Ce mémoire se propose d’analyser l’engouement qu’a suscité à réception le deuxième roman de l’auteur lyonnais Alain Damasio, La Horde du Contrevent. En effet, en plus d’avoir reçu dès sa sortie un accueil populaire et académique conséquents, ce dernier semble provoquer chez nombre de lecteurs ce que l’on pourrait nommer une réception participative: le déclenchement de productions énonciatives et textuelles autour du roman, un appel à l’appropriation, à la connivence et à la création. Après en avoir cherché les causes dans l’horizon d’attente du genre et dans les spécificités de l’écriture damasienne, ce parcours met en lumière l’influence croissante d’une culture médiatique convergente, dont la portée s’est vue décuplée par les nouvelles technologies de communication. Dans ce cadre, la participation pourrait être lue autant comme une aliénation que comme une résistance.
De la modélisation d'un algorithme à la création de savoir en sciences humaines. Étude d'un cas pratique.
Maffeil Boillat, Stefania,
Piotrowski, Michael
La vague numérique semble avoir tout emporter sur son passage. De la traduction automatique au big data, les domaines qui sont sensés travailler dans les domaines de l’art et de la culture semblent progressivement évincés par des ingénieurs aux savoirs plus techniques. Dans la présente étude, nous chercherons à montrer que l’établissement de modèles algorithmiques est
également à portée de main d’un étudiant ayant un cursus en Lettres et que les humanités numériques pourraient incarner un médium entre le monde numérique et le monde des Lettres. Nous présenterons un cas pratique où nous avons établi un système expert permettant d’imiter l’évolution phonétique du latin vulgaire à l’ancien français. Une fois l’évolution établie, nous pouvons l’utiliser pour repérer des termes ayant suivi une autre route évolutive et ayant abouti à des dialectes. Une fois les résultats établis, nous proposerons également une réflexion autour du numérique et l’uniformisation du savoir qu’impose l’ordinateur.
Entre fée serpente et fée maternelle : Réécritures et métamorphoses de Mélusine en littérature de jeunesse contemporaine.
Wahlen, Barbara
Longtemps restée en marge des productions médiévalisantes pour enfants, la fée Mélusine ne semblait initialement pas pouvoir entrer en littérature de jeunesse. En effet, si cette fée-serpente aussi mystérieuse qu’insaisissable a fait l’objet de nombreuses réécritures depuis son apparition dans les romans médiévaux de Jean d’Arras et de Coudrette au tournant du XVe siècle, son ambivalence intrinsèque, la symbolique négative associée à sa queue de serpent, de même que son histoire tragique parsemée de meurtres n’encourageaient pas a priori une adaptation pour de jeunes lecteurs. Pourtant, la nette augmentation des productions jeunesse à son égard depuis les années 2000 témoigne de l’engouement croissant pour cette fée ambivalente. Dès lors, comment expliquer cet intérêt soudain et plus encore, comment adapter cette figure si singulière pour un jeune public ? En prenant appui sur un corpus de livres contemporains pour enfants âgés entre 4 et 14 ans, notre étude se propose de comprendre l’attrait pour ce personnage en littérature de jeunesse et plus précisément d’analyser les différentes modalités de réécritures mises en œuvre par les auteurs afin d’adapter ce récit pour de jeunes lecteurs. Par la mise au jour des stratégies, tant iconographiques que textuelles, établies par les auteurs modernes, nous découvrirons alors la manière dont le Roman de Mélusine a été actualisé, renouvelé et rendu accessible à un jeune lectorat, de même que les divers réinvestissements de cette fée en littérature de jeunesse.
Le personnage de l'enfant dans deux fictions pour adultes : "La vie devant soi" et "Lignes de faille". Analyse des effets affectifs et intellectuels provoqués sur le lecteur.
Caraion, Marta
L’analyse des jeunes narrateurs de La vie devant soi et Lignes de Faille et des effets qu’ils produisent sur le lecteur adulte met en lumière les procédés à l’œuvre dans la réception de personnages-enfants. Encore peu étudiés hors du contexte de la littérature de jeunesse, ceux-ci appellent la construction de nouveaux outils méthodologiques. L’application comparée de la théorie de l’effet-personnage de Vincent Jouve et celle de la non-fiabilité narrative proposée par Ansgar Nünning révèle une fondamentale intrication des données textuelles et du bagage culturel et littéraire du lecteur. L’imaginaire extratextuel entourant l’enfant, sur sa vulnérabilité et sa nécessaire protection, engendre des mouvements empathiques qui sont confirmés dans le texte par l’exposition de l’intimité des narrateurs. Par ailleurs, le travail formel d’imitation de la langue enfantine fait appel aux compétences du lecteur et à son implication active dans le décodage du texte. Un décalage au niveau des connaissances historiques et linguistiques est également thématisé dans les deux fictions, décalage qui infériorise les jeunes personnages et permet de provoquer le rire du lecteur. Le langage enfantin, tel qu’il est mimétiquement reproduit dans ces fictions permet de concevoir le fonctionnement du texte comme un détournement parodique de la langue « adulte ».
Le théâtre de George Sand, de Nohant à Paris. Analyse et trajectoire de deux pièces du répertoire de Nohant, Le Pavé et Le Drac
Ponzetto, Valentina
Ce travail s’intéresse à la production théâtrale de George Sand, plus particulièrement celle de son théâtre privé de Nohant. Le questionnement mené porte sur la capacité d’évolution d’œuvres de théâtre créées pour un public privé dans un cadre intime. Nous avons donc voulu étudier ce théâtre particulier que représente Nohant, deux des pièces qui font partie de son répertoire et enfin comment et pourquoi ces dernières ont quitté la scène de Nohant pour celles de Paris.
Notre approche a été très analytique dans un premier temps. Nous avons observé la vie du théâtre de Nohant physique et analysé quels moteurs généraient sa constante évolution et comment l’écriture dramatique de George Sand s’inscrivait dans ce processus créatif.
Notre seconde partie est dédiée à l’étude de deux pièces écrites à Nohant, Le Drac et Le Pavé. L’objectif étant d’en montrer les caractéristiques propres à chacune se rapportant au théâtre de Nohant. Nous voulions démontrer le caractère unique et libre que présentent ces pièces, où l’auteur a pu s’exprimer libérée des contraintes inhérentes aux pièces « parisiennes ». Il s’agit donc de relier la création littéraire à son environnement. La dernière étape de notre réflexion a porté sur le processus d’adaptation des deux pièces, de la scène de Nohant à celles de Paris. Nous avons donc orienté notre recherche sur les modifications apportées, leur justification et nous nous sommes interrogés sur les effets de ces dernières sur le texte théâtral, à savoir est-ce que l’œuvre était modifiée au point d’en devenir une autre ou si les changements effectués n’altéraient pas le contenu initial.
Nous avons voulu éclairer une partie trop méconnue de l’œuvre de George Sand et apporter quelques éléments sur l’étude de ces pièces issues du théâtre de société et écrites dans ce cadre si particulier qu’est le Théâtre de Nohant.
Même pas peur ! La figure du loup dans la littérature de jeunesse du XXIe siècle
Wahlen, Barbara
Au début du XXIe siècle, période pendant laquelle l'enfant européen doit, aux yeux de beaucoup d'adultes, être préservé de tout sentiment désagréable, la peur ne trouve plus sa place dans la littérature de jeunesse pour la tranche d’âge de trois à cinq ans. Ce qui inspire de la frayeur est évincé ou détourné afin de rassurer le petit lecteur. C'est le cas pour la figure du loup, l'un des principaux personnages effrayant les enfants depuis de nombreux siècles, à travers les contes ou récits lui réservant toujours la place du Grand Méchant Loup dans une visée éducative. Pourtant, les adaptations actuelles de ces derniers, notamment celui du Petit Chaperon rouge, font souvent de lui un animal ridiculisé voire victimisé pour soulager l'enfant, que ce soit à travers ses représentations iconographique et textuelle ou les activités divertissantes lui étant apposées dans les ouvrages de jeunesse. Contrairement à ce dernier, le personnage comique d’Ysengrin, célèbre protagoniste du Roman de Renart, ne subit que de très modestes transformations dans ses adaptations modernes. Cette différence les opposant s’explique par la forte volonté des auteurs et illustrateurs d’épargner la peur à l’enfant. En effet, plus le loup s’avère effrayant, plus ils ont tendance à lui imposer d'importantes modifications à travers divers procédés contribuant à le dédramatiser. Suite à cette constatation, il a été question d'observer ce qu'il en est du loup d'aujourd'hui, créé au XXIe siècle tout à fait indépendamment des loups des récits passés déjà connus du public. Le Grand Méchant Loup a disparu au profit d'un loup ami de l'enfant, bienveillant et pour le plus souvent sensiblement anthropomorphisé, aussi bien caractériellement que physiquement et matériellement. Ainsi, la peur prohibée a poussé la figure du loup à s’émanciper et à se forger une réputation plus positive que celles des siècles précédents.